Opinion
La démission de
Mikati et le plan d'escalade américain
Ghaleb
Kandil
Lundi 25 mars
2013
La
démission du gouvernement de Najib
Mikati est la copie libanaise du plan
d'escalade américain à l'échelle
régionale, et dont le coup d'envoi a été
donné par le président Barack Obama lors
de sa visite en Israël. Au Liban, la
démission avait été précédée par de
nombreux indices politiques. Elle ouvre
la porte à une nouvelle étape de la
confrontation politico-sécuritaire, qui
s'inscrit dans le cadre de la guerre
mondiale menée contre l'Etat national
syrien et dont les acteurs veulent
transformer le Liban en plateforme pour
attaquer ce pays voisin et porter
atteinte à la Résistance, qui constitue
une force de dissuasion contre Israël et
ses soutiens.
Les
premiers indices de cette escalade sont
apparus avec les déclarations, il y a
quelques semaines, de l'ambassadeur des
Etats-Unis à Beyrouth, qui a exigé
l'organisation des élections au Liban
selon la loi de 1960. Maura Connelly a
ainsi torpillé toutes les tentatives
interlibanaises d'aboutir à une loi
électorale consensuelle, car Washington
et ses alliés du Golfe sont parvenus à
la conclusion que toute loi rectifiant
la représentation chrétienne permettrait
de dégager une majorité claire qui
ferait échec à la mission qu'ils ont
confié au bloc centriste, qui consistait
à neutraliser les initiatives
nationales, une tâche que le 14-Mars, le
Courant du futur en particulier, n'ont
pas réussi à mener à bien. Le mot
d'ordre de Connelly donne le coup
d'envoi à une période de confrontations
et de troubles.
Les
propos agressifs et provocateurs à
l'égard du Hezbollah, prononcés par
Obama, constituent un autre indice
émanant, celui-ci, de la plus haute
autorité américaine. Le président US est
la source des instructions de Washington
aux pétromonarchies, à la Turquie, à ses
auxiliaires libanais et aux pays
européens. C'est lui qui ordonne et tous
les autres s'exécutent. Certaines
personnalités et forces politiques
libanaises se plient à ses ordres, sous
prétexte que l'Occident gagne toujours,
alors que les expériences du passé
prouvent qu'au Liban, il a essuyé de
lourdes défaites. Ou bien alors, elles
affirment qu'elles sont incapables de
supporter les pressions exercées sur
elles. L'ordre américaine est clair: le
moment est venu de mettre un terme au
partenariat avec le Hezbollah au sein du
gouvernement.
Les deux
points litigieux qui sont, en apparence,
à l'origine de la démission de Najib
Mikati, sont au centre de l'intérêt
américain: l'insistance à former la
commission de supervision des élections
s'inscrit dans le cadre de la volonté
d'organiser les élections sur la base de
la loi de 1960; l'insistance à maintenir
le général Achraf Rifi à la tête des
Forces de sécurité intérieure (FSI) est
tout à fait naturelle, vu que depuis
2005, cette institution est au cœur du
dispositif qui fournit
services et renseignements aux
Américains et à leurs auxiliaires
régionaux, notamment ceux qui sont
impliqués dans la guerre contre la
Syrie.
Les
responsables libanais qui ont milité
pour le maintien de Rifi à la tête des
FSI savent pertinemment que cet homme et
l'institution qu'il dirige ont apporté
soutien et protection aux mouvements
takfiristes proches d'Al-Qaïda, et
autres groupes terroristes
multinationaux au Liban, dans les camps
palestiniens et à l'intérieur de la
prison centrale de Roumié.
La
démission illustre l'enchevêtrement des
enjeux politiques et sécuritaires avec
la loi électorale. Toute solution
politique devra attendre l'effondrement
des illusions américaines en Syrie et la
défaite des Etats-Unis dans ce pays.
La
tournée d'Obama
Le
président américain a donc donné le coup
d'envoi de cette escalade lors de sa
tournée régionale dont le but était de
resserrer les rangs de ses alliés,
d'aplanir les divergences qui existent
entre certains d'entre eux, dans le but
d'essayer de modifier les rapports de
forces en Syrie et dans la région. Il a
d'abord donné le signal de la guerre
ouverte contre le Hezbollah, il a
convaincu la Jordanie de jouer
pleinement le rôle qui lui est imparti
dans l'agression contre la Syrie (afflux
de terroristes, entrainement sur le
territoire du royaume etc...) et, enfin,
il a réglé le pseudo-différend entre la
Turquie et Israël.
Son
secrétaire d'Etat a été chargé de faire
le suivi, en essayant d'isoler la Syrie
de ses alliés. John Kerry a prévenu
dimanche à Bagdad le Premier ministre
irakien Nouri al-Maliki que des avions
chargés d'armes qui relient l'Iran et la
Syrie en traversant l'espace aérien
irakien contribuaient à maintenir Bachar
al-Assad au pouvoir. "J'ai très
clairement dit au Premier ministre que
les survols d'appareils épartis d'Iran
contribuaient à soutenir le président
Assad et son régime", a déclaré M. Kerry
à des journalistes après sa rencontre
avec M. Maliki dans la capitale
irakienne. "Tout ce qui aide le
président Assad pose problème", a ajouté
M. Kerry, qui s'exprimait pendant une
conférence de presse organisée lors
d'une visite surprise dans la capitale
irakienne.
Le décor
est planté, la bataille décisive va
bientôt commencer.
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