Tendances au Moyen-Orient
La Russie veut
sauver le plan de Kofi Annan,
l'Occident veut le saboter
Ghaleb Kandil
Lundi 11 juin 2012
L'idée d'organiser une conférence
internationale ou un groupe de contact
sur la Syrie, proposée par la Russie,
vise à appuyer, protéger et relancer le
plan de sortie de crise de l'émissaire
de l'Onu Kofi Annan.
Il est clair que depuis l'adoption de ce
plan de sortie de crise, l'alliance occidentalo-turco-arabe a mis en œuvre
un projet intégré dans le but de le
torpiller, sans assumer ouvertement la
responsabilité de ce sabotage. Cette
alliance a intensifié son aide politique
et matérielle aux insurgés, accélérant
les transferts d'armes, d'argent et
d'hommes vers la Syrie, et assurant une
couverture médiatique globale aux
rebelles.
Le délégué permanent de Russie aux
Nations unies, Vitali Tchourkine, a
ainsi estimé, samedi, que les démarches
des «amis de la Syrie» ne contribuent
pas à régler la crise syrienne, car au
lieu d'appliquer le plan Annan, ce
groupe cherche à renverser le pouvoir
syrien. «Nous estimons que les 'amis de
la Syrie' -qui se réuniront à Paris à
l'initiative du président français
François Hollande le 6 juillet-, sont
une structure nuisible, car leur
activité se ramène de fait à différents
subterfuges destinés à renverser le
gouvernement en place à Damas et non à
des démarches visant à appliquer le plan
formulé par Kofi Annan», a déclaré M.
Tchourkine à la chaîne de télévision
Rossia-1.
La conférence proposée par Moscou
pourrait réunir une quinzaine de pays,
dont tous les membres permanents du
Conseil de sécurité de l'Onu (Russie,
Etats-Unis, France, Grande-Bretagne et
Chine), le Qatar et l'Arabie saoudite,
ainsi que les voisins de la Syrie: le
Liban, la Jordanie, l'Irak, la Turquie
et l'Iran. Des structures
internationales telles que la Ligue
arabe, l'Organisation de la coopération
islamique, l'Union européenne et l'Onu
doivent également prendre part à ce
forum qui se réunirait sous l'égide des
Nations unies.
Dans une volonté de torpiller cette
initiative, les Etats-Unis et la France
se sont catégoriquement opposés à l'idée
d'associer l'Iran au règlement de la
crise syrienne.
Face à l'attitude négative de l'alliance
occidentale, la Russie durcit ses
positions et commence à nommer les
choses par leurs noms. Le ministre russe
des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov,
a révélé lors d'un point de presse que
Moscou dispose d'informations dignes de
foi attestant que les groupes armés de
l'opposition syrienne sont placés sous
le commandement de forces extérieures.
Il confirme ainsi ce que s'évertue à
dire Damas depuis le début de la crise,
sur le fait que ce qui secoue la Syrie
n'est pas un mouvement de contestation
populaire pacifique mais un complot
ourdi par des forces étrangères, qui
utilisent une violence sans limites.
«Nous avons suffisamment de preuves
confirmant que les rebelles reçoivent
des armes et d'autres moyens dont ils
ont besoin pour maintenir leur capacité
de combat et que des renseignements sont
mis à la disposition de l'Armée syrienne
libre (ASL)», a affirmé le ministre.
Selon M. Lavrov, Moscou sait bien où se
trouve l'état-major de l'ASL et quels
sont les pays qui financent la
rébellion. «D'ailleurs, ces pays ne le
cachent pas: nos collègues saoudiens et
qataris en parlent ouvertement. Des
hommes d'affaires syriens se sont
réunis, hier, à Istanbul, pour annoncer
la création d'un fonds destiné à
financer l'Armée syrienne libre», a
indiqué le chef de la diplomatie russe.
Il s'est dit persuadé que ces
informations sont bien connues des
services spéciaux de l'Otan. «Lors
d'entretiens privés, menés sans
journalistes, nos collègues
(occidentaux) se montrent parfaitement
au courant de ce qui se passe réellement
en Syrie», a-t-il souligné.
Le ministre a réaffirmé l'attachement de
la Russie au plan Annan. «Je ne crois
pas qu'il soit impossible d'appliquer le
plan de l'émissaire de l'Onu, a-t-il
dit. Je ne dirais pas qu'aucun point du
plan de Kofi Annan n'est réalisé, bien
que certains de nos collègues préfèrent
le dire pour faire monter la tension»,
a-t-il ajouté. Le ministre a rappelé que
les autorités syriennes coopèrent avec
l'équipe de l'émissaire international
conformément au premier point du plan et
M. Annan se félicite de ces contacts.
«Rien n'empêche l'équipe de M. Annan de
communiquer avec les autorités», a
ajouté le chef de la diplomatie russe.
Depuis des mois, nous affirmons dans ces
colonnes que le dénouement de la crise
syrienne définira la nature des
équilibres mondiaux et des relations
internationales. M. Lavrov vient de
confirmer à quel point ce qui se passe
en Syrie est crucial pour l'avenir du
monde. «La façon dont sera réglée la
crise syrienne aura un rôle extrêmement
important dans l'avenir de notre monde.
Il s'agira alors soit d'un monde basé
sur la Charte de l'Onu, soit d'un monde
où le droit du plus fort sera reconnu et
respecté», a indiqué le ministre.
Pendant ce temps, l'agence Fars
iranienne a rapporté que des groupes
extrémistes en Syrie se sont équipés
d'armes chimiques en provenance de la
Libye. Selon l'agence, des
«terroristes», se trouvant actuellement
sur le territoire turc, s'entraînent à
manier les gaz de combat. Leur objectif
est de perpétrer une attaque contre la
population civile et en accuser ensuite
l'armée nationale syrienne. «Toute
information publiée actuellement ou à
l'avenir sur un éventuel recours à
l'arme chimique par l'armée
gouvernementale syrienne ne signifiera
que les terroristes ont recouru à cette
arme contre la population pour en faire
porter la responsabilité à l'armée et au
gouvernement syrien», annoncent des
médias syriens cités par l'agence Fars.
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