Opinion
Nucléaire Iranien
: Fanatisme en 3 C ...
Georges Stanechy
La
centrale nucléaire israélienne de Dimona
Jeudi 2 août 2012
«
Les contradictions à l’œuvre dans la
logique des Droits de l’Homme … disent
l’imminence d’un monde où
l’extermination pourra se décider sous
la bannière des démocraties »
Catherine Coquio (1)
La Nef des Fous
Fin juillet.
Mitt Romney,
le candidat milliardaire du “parti
républicain” aux élections
présidentielles des USA, en novembre
prochain, vient d’accomplir son
pèlerinage en Israël. Multipliant les
déclarations à l’encontre de la Nation
Palestinienne qui attend vainement,
depuis plus de 60 ans pour certaines,
l’application d’une quarantaine de
résolutions de l’ONU protégeant ses
droits, sa sécurité et son existence.
Mieux. Allant jusqu’à
programmer, s’il est élu, d’enfreindre
une résolution hautement symbolique du
Conseil de Sécurité de l’ONU quant au
statut de Jérusalem, voulant y
transférer l’ambassade américaine dès
son élection, au lieu de Tel-Aviv.
A ce festival de
négationnismes, du droit international,
des décisions de l’ONU, de l'existence
du Peuple Palestinien se sont,
inévitablement, ajoutées de violentes
diatribes iranophobes. Relayées par ses
différents porte-paroles, les propos
fanatiques, bellicistes, de
Mitt Romney sont la réédition
hystérique de l’idéologie dominante de
l’Empire décadent.
Un des responsables
de l’administration palestinienne,
Saeb Erekat, en a résumé la teneur
et en a tiré la conclusion (2) :
«
Cet homme est venu faire ici la
promotion de l’extrémisme, de la
violence et de la haine. Et, c’est
absolument inacceptable. »
La Nef des Fous
de Jérôme Bosch (≈1500)
Rien de surprenant.
Tant nous savons qu’en Occident, le
remplissage des caisses électorales et
l’accès aux médias, imposent ces rites
devenus, à présent, immuables.
Lors de ce séjour, au
cours d’une soirée à Jérusalem, il a
encaissé plus d’un million de dollars de
la part de 45 donateurs. Tout au long de
cet évènement mondain, était assis à ses
côtés le magnat des casinos,
Sheldon Adelson, qui a déclaré
vouloir consacrer 100 millions de
dollars de sa fortune pour qu’Obama,
jugé trop « mou » à l’égard des
Palestiniens et des Iraniens par les
extrémistes sionistes, soit battu aux
prochaines élections présidentielles.
(3)
Ses postures
cataclysmiques à l’encontre de l’Iran,
représentent une véritable déclaration
de guerre. Affirmant sa totale
solidarité avec Israël face à la menace
nucléaire de l’Iran et « ses intentions
malveillantes » (“malevolent
intentions”). (4) Car, chez ces
promoteurs de carnages, on se doit de
lancer une guerre pour lutter contre «
les malveillantes intentions ». Comme
« le péché
originel », qui
au temps de
l’obscurantisme religieux en Occident
devait être éradiqué...
Un des principaux
conseillers de
Mitt Romney,
Dan Senor, enfonçait le clou en
déclarant un soutien inconditionnel du «
parti républicain » et de son candidat à
toute initiative militaire unilatérale
d’Israël contre les « sites nucléaires
». Ce qui revient à dire, connaissant
les précédents de l’Irak, de
l’Afghanistan et de la Libye : procéder
à la totale destruction de l’Iran.
Les mots énoncés sont
importants à noter (5) :
«
Toute initiative qu’Israël prendrait,
afin d’arrêter l’Iran dans le
développement de ses capacités (“capability”)
nucléaires… ».
Notons le mot «
capability ». Il devient à présent le
mot-clef, l’idée-force, le leitmotiv, de
tout l’enjeu géopolitique ou hégémonique
de l’Occident. L’Iran, signataire du
Traité de Non Prolifération Nucléaire
(TNP), en respecte scrupuleusement
tous les clauses. Tout le monde en
convient. Il ne possède aucune bombe, et
n'a pas l’intention d’en construire.
Tout le monde le sait.
Ce qui lui est
interdit, maintenant, contrairement à
l’esprit et aux termes du Traité de Non
Prolifération Nucléaire et au respect de
la souveraineté nationale des Etats,
c’est la « capacité » intellectuelle
d’en construire, d’avoir le niveau des
connaissances scientifiques et
techniques.
Alors qu’il est
explicitement stipulé par le traité TNP,
dans son article IV, alinéa 1 :
«
Aucune disposition du présent Traité ne
sera interprétée comme portant atteinte
au droit inaliénable de toutes les
Parties au Traité de développer la
recherche, la production et
l’utilisation de l’énergie nucléaire à
des fins pacifiques, sans discrimination
et conformément aux dispositions des
articles I et II du présent Traité.
»
Mais, en définitive
les puissances occidentales exigent de
l’Iran d’arrêter toute recherche,
effacer toute connaissance et savoir
dans le domaine nucléaire, y compris
civil. Préconisant d’assurer ses
éventuels besoins en nucléaire médical
ou énergétique, méticuleusement et
arbitrairement sélectionnés au-préalable
par la Bande des Quatre
(USA-Israël-GB-France), sous forme de
sous-traitance auprès des “grandes
puissances”.
C’est en fait le
démantèlement de l’indépendance
technique, scientifique et de la
maitrîse de son développement qui
est exigé par l’Empire. L’Iran a
parfaitement compris qu’il s’agit d’un
prétexte pour, quoi qu’il fasse et qu’il
dise, procéder à sa destruction. Une «
Somalisation » imposée comme elle l’est
en Palestine, au Liban, en Irak, en
Afghanistan, au Pakistan, en Libye, et
qui doit s’appliquer à présent autant à
la Syrie qu’à l’Iran. Ainsi en a décidé
l’Empire. L’Iran, bien évidemment, en
refuse et la perspective et la
réalisation. Et en conséquence, se
prépare à
défendre sa souveraineté.
Exigence
frénétiquement reprise en écho par
l’actuel ministre de la Défense des USA
et ancien dirigeant de la CIA, Leon
Panetta, dans son récent discours à
Tunis, renouvelant l’interdiction pour
l'Iran de toute “nuclear
capability” (6) :
« … encourager
l’effort international exerçant les
pressions sur l’Iran afin qu’il renonce
à ses “capacités nucléaires”… »
Ce politicien caricatural ne cesse, lui
aussi, de s’illustrer par des propos
bellicistes et arrogants à l’égard des
pays qui démontrent des velléités
d’indépendance face aux prétentions
impériales. Connu pour son langage
maffieux et ordurier que même un Don
Corleone, grand patron de la Mafia
magistralement interprété par Marlon
Brando dans le film “Le Parrain”, se
gardait d’employer, n’élevant jamais la
voix, mettant un point d’honneur à
parler avec douceur dans la
conciliation.
Evoquant obsessionnellement une attaque
imminente d’Israël contre l’Iran. Il
l’avait prévue pour le “printemps”, puis
pour cet été, sinon pour l’automne… Ou
encore, brandissant à la
Torquemada, les châtiments et
tortures réservés aux hérétiques,
dirigeants des pays refusant d’obéir aux
injonctions qui leurs sont adressées par
l’Empire et ses représentants.
Témoin la récente apostrophe de Leon
Panetta à l’égard du Président de la
Syrie, via les médias serviles, dans une
allusion au sort réservé à Kadhafi,
sodomisation à la Kalachnikov et
lynchage après élimination de ses gardes
du corps (7) :
« Si tu
veux être en mesure de te protéger ainsi
que ta famille, tu ferais mieux de
“foutre le camp” tout de suite
»
(“If you want to be able to protect
yourself and your family, you’d better
get the hell out now”, [to
get the hell out = foutre le camp]).
Langage de soudards,
voyous irresponsables et bellicistes,
relayés par nos propres politiciens,
partis et gouvernants ? Expression de la
pensée d’une race s’estimant supérieure
à toutes les autres, réputées
“malveillantes” et sauvages ? Pensée
fondée sur le mépris, le mensonge, la
violence ? Répandant la mort et la
destruction, alors que notre planète a
tant besoin de partager : paix,
apaisement, solidarité, connaissance,
santé, éducation, prospérité ?
Pathologie
individuelle ? Mais, ces Cavaliers de
l’Apocalypse sont au pouvoir. Pathologie
collective, alors, ne reconnaissant du
mérite qu’au "fanatique" ? «
Fanatique », ce
« héros qui pour faire triompher ses
préjugés est prêt à faire le sacrifice
de votre vie », pour reprendre
l’humour d’Albert Brie.
Cette oligarchie de
la prédation, inconsciente ou satisfaite
des ravages qu’elle provoque, rappelle “La
Nef des Fous” de Jérôme Bosch.
Cet esquif sans voile, ni rames, ni
gouvernail, si ce n’est une grande
louche, emportant, hébétés et délirants,
un ramassis d’irresponsables vers on ne
sait où.
Oui, pagayant à la
louche dans l’imbécilité criminelle…
Le dessin des
lucides
Mais, véritable bol
d’air frais…
De nombreux pays
s’interrogent, réagissent, face au
fanatisme de la nomenklatura de
l’Empire. Stupéfaits, par ce spectacle
de soumission des gouvernements
européens, tout particulièrement.
D’aliénation, au sens où l’entendait
Marx, mais aussi dans son sens
psychiatrique. Cette paralysie face à la
privation de la liberté et la capacité
de penser dans la dénonciation de la
violence guerrière, de la négation de la
Dignité Humaine.
En dehors de la
sphère de l’OTAN et de l’emprise
médiatique occidentale, des espaces de
liberté, de circulation d’information,
de lutte contre la propagande, se
multiplient. Dans ce flux, mentionnons
la place éminente des caricaturistes.
Leur capacité
d’analyse, leur sens de la synthèse,
souvent supérieurs à ceux de bien des
chroniqueurs et “experts”, produisent
des œuvres dont la publication est
inimaginable actuellement dans nos
médias dits “dominants”. Tant l’esprit
critique, le niveau d’information,
dénonçant le fanatisme, la stupidité, le
mensonge de nos cases politiques, sont
fulgurants.
Grand admirateur de
leur travail, j’ai choisi 3 dessins dans
cette abondante production, dénonçant
dans un effet de relief le fanatisme de
l’Occident à l’encontre de l’IRAN :
Le premier nous
montre un
Vanunu essayant désespérément
d’attirer l’attention de la « brigade
anti-prolifération », examinant à la
loupe l’inexistence de la bombe
iranienne, sur le parc impressionnant de
bombes et armes atomiques, parfaitement
opérationnelles, en possession d’Israël.
Le chef de la brigade en grogne
d’agacement :
"
Ça suffit Vanunu, tu ne vois pas que
nous sommes occupés ? "...
L’effet comique étant
renforcé, en bas à gauche de la
caricature, par la réponse d’un
responsable de l’arsenal israélien
affirmant à un curieux au long nez, que
ce qui semble être des bombes nucléaires
ne sont en réalité que des « saucisses
cashers géantes » !
Ce remarquable
dessin, repris dans de nombreux journaux
en Asie notamment, met en valeur trois
éléments d’information pertinents :
i)
Rappelons que
Mordechai Vanunu est cet ingénieur
israélien qui avait rendu public
l’armement nucléaire secret d’Israël.
Enlevé par les services spéciaux
israéliens à Rome, où il s’était
réfugié, il a été condamné à 18 ans de
prison. Au terme de sa peine, dont 11
ans en isolement complet, il n’est
toujours pas “libéré”,
puisqu’interdiction lui est faite de
sortir du territoire et de parler à
toute personne étrangère, en particulier
aux médias internationaux.
ii)
Israël n’est pas, en effet, signataire
du Traité de Non Prolifération
Nucléaire. Et, donc paradoxe, non soumis
à une quelconque inspection ou demande
de justification de la part de
l’organisation de l’ONU chargée du
contrôle de la non prolifération qu’est
l’AEIA.
Le parc des ogives nucléaires
opérationnelles secrètement détenues par
Israël, est estimé entre un minimum de
200 et une moyenne de 400 à 500. Avec,
bien sûr, leurs vecteurs : missiles
balistiques, de croisière, avions,
navires et sous-marins.
iii)
A ce jour l’Iran, signataire du TNP, a
été soumis à plus de 4000 inspections,
dont plus d'une centaine inopinées.
Toutes ses installations nucléaires, y
compris celles souterraines de Fordo
avec ses instruments de mesure, sont
sous caméras de surveillance 24/24,
reliées à AEIA. Aucune ne dépasse le
seuil d’enrichissement autorisé par le
Traité pour les besoins civils qui est
de 20 % (une bombe exige un
enrichissement de 90 %).
Le pays ne possède, ni ne fabrique de
bombe nucléaire, souhaitant au contraire
une dénucléarisation du Moyen-Orient
sous toutes ses formes : sans oublier
les armes nucléaires embarquées à bord
de navires et sous-marins en Mer Rouge
ou dans le Golfe Persique.
Le deuxième vient de
Chine, dénonçant le ridicule de la
propagande anti-iranienne des USA.
Mettant en scène l’Oncle Sam en chanteur
grattant un petit
Ukulélé, symbolisant le « problème
nucléaire iranien » (“Iran
nuclear issue”), amplifié par
d’énormes enceintes acoustiques.
Le troisième émanant
du Brésil, efficace de réalisme, montre
une planète malgré sa volonté, au bord
du précipice, d’une conflagration, d’un
désastre, majeurs. Les USA sous les
traits de l’Oncle Sam, haineux,
halluciné, en treillis, l’arme au poing
ornée du fanion israélien, entraînant,
suicidaire, le monde à sa perte…
Trois caricatures,
projetant en relief le délire guerrier.
Le fanatisme de
l’Occident, en 3 C…
(1)
Catherine Coquio, à propos des
premières pages de l’ouvrage
“L’Impérialisme” d’Hannah Arendt,
Catherine Coquio et la singularité des
génocides, in
Désir d’Afrique de Boniface Mongo-Mboussa,
Collection Continents Noirs, Gallimard,
2002, p. 179. Fondatrice de
l'Association
Internationale de Recherche sur les
crimes contre l'Humanité et les
Génocides (AIRCRIGE).
(2) "What
this man is doing here is just promoting
extremism, violence and hatred, and this
is absolutely unacceptable", Saeb
Erekat,
Romney’s al-Qud claim unacceptable :
Palestinian official, PressTV, 30
juillet 2012,
http://www.presstv.ir/detail/2012/07/30/253538/romneys-alquds-claim-unacceptable/
(3) in Ramsey, Iran Diplomacy hits
new sanctions roadblock, 1er août 2012,
http://www.atimes.com/atimes/Middle_East/NH01Ak01.html
(4) Harriett Sherwood,
Mitt Romney declares unity with Israel
over Iranian nuclear threat, The
Guardian, dimanche 29 juillet 2012,
http://www.guardian.co.uk/world/2012/jul/29/mitt-romney-unity-israel-iran
(5) Dan Senor, "If
Israel has to take action on its own, in
order to stop Iran from developing that
capability, the governor would
respect that decision", The
Guardian, Op. Cit.
(6)
Panetta and
Israel to discuss war plans against Iran
?,
RT, 30 juillet 2012,
http://rt.com/usa/news/panetta-israel-iran-plan-417/
(7) “Assad
better get the hell out”, RT, 31
juillet 2012,
http://www.rt.com/news/panetta-syrian-military-intact-458/
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