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Opinion
La Justice
Internationale entre les assassinats de Hariri et Arafat !
Fadwa Nassar
Yasser Arafat
Lundi 15 novembre 2010
Au cours d’un meeting ayant rassemblé des milliers de
personnes, à Umm al-Fahem en Palestine occupée, sous le thème «
protéger les constantes palestiniennes » plusieurs responsables
politiques palestiniens ont réclamé que la lumière soit faite
sur l’assassinat du dirigeant palestinien, premier président de
l’Autorité palestinienne et président de l’OLP, Yasser Arafat.
Ils ont réclamé la mise en place d’un tribunal international
pour découvrir et juger les assassins de ce grand dirigeant de
la lutte palestinienne.
L’assassinat du dirigeant palestinien Yasser Arafat a été
exécuté par empoisonnement. Il est décédé à Paris, au mois de
novembre 2004, des suites du mal qui a ravagé son corps. Les
experts médicaux affirment qu’il avait été empoisonné alors
qu’il était assiégé à Ramallah, dans ce qui est appelé « al-Mouqataa
».
Qui l’a assassiné ? Et pourquoi ? Depuis 5 ans, les experts et
les contre-experts se bousculent pour fournir des explications
et des preuves. Politiquement, son assassinat sert l’Etat
sioniste et tous ceux, Palestiniens, arabes et étrangers, qui
avaient trouvé qu’il représentait une défense encore coriace
contre l’effritement de ce qui est appelé les constantes
palestiniennes, soit les revendications palestiniennes
premières, la libération du territoire et l’instauration d’un
Etat indépendant et souverain « sur toute parcelle de terre
libérée ».
Que ce soient les sionistes, d’abord, puis les grandes
puissances et notamment la France, où se trouve le dossier
médical du premier président palestinien, et leurs complices
arabes et palestiniens, et même au sein du Fateh et de
l’Autorité palestinienne, tous ont voulu tourner la page, sans
faire la lumière sur ce qui peut être considéré jusqu’à présent
comme le plus grand assassinat politique des dernières décennies
dans le monde.
Yasser Arafat fut une grande personnalité historique. Dès les
années 60, il a dirigé un des plus grands mouvements de
l’histoire de la résistance à l’occupation. Reçu par d’éminentes
personnalités historiques dans le monde, par de nombreux chefs
d’Etats arabes et internationaux, il s’était retrouvé, à l’ONU
en 1974, pour narguer et défier toutes les puissances
impériales. Populaire au sein de son peuple qui y voyait le
symbole de sa lutte et de la libération, il est demeuré une
figure représentative du combat palestinien, malgré les graves
erreurs qu’il avait commises, la plus importante étant celle de
la signature des accords d’Oslo. D’ailleurs, il l’avait compris
et a essayé, autant que possible, d’y remédier au cours de
l’Intifada al-Aqsa, en soutenant et en protégeant les
combattants, sinon en leur donnant les ordres de combat et en
les armant.
L’assassinat d’une telle personnalité aussi imposante dans le
cours de l’histoire internationale n’a fait broncher ni l’ONU,
ni le conseil de sécurité, ni « la communauté internationale »,
au contraire. Les représentants de « la légalité internationale
» ont tout fait, en s’aidant bien évidemment des complices
locaux et régionaux, pour étouffer une telle affaire.
Quelques mois plus tard, en février 2005, était assassiné le
premier ministre libanais, Rafiq Hariri par l’explosion de sa
voiture et du convoi qui l’accompagnait. Sans nous attarder
cependant sur la différence entre les deux hommes politiques,
tant au niveau de leurs orientations, de leur stature
internationale ou de leur popularité, la manière dont la «
légalité internationale » a agi envers les deux assassinats est
tout à fait différente.
S’il est de plus en plus évident que l’Etat sioniste est
responsable de l’assassinat de Hariri, surtout après les preuves
apportées par sayyid Hassan Nasrullah, secrétaire général du
Hezbollah, concernant la surveillance par le biais des drônes
israéliens de l’ancien premier ministre et de son parcours
quotidien dans les rues de Beyrouth ou aux alentours, mais aussi
par la présence d’un grand nombre de collaborateurs qui ont
exécuté des assassinats et qui auraient pu participer à
celui-ci, l’appel à instaurer un tribunal international, sous
l’égide de l’ONU, mais dominé par les Etats-Unis et les
puissances occidentales, a entièrement dévié l’enquête pour
perdre le fil de la vérité dans les dédales des intérêts
impérialistes.
Avec l’aide d’agents locaux et régionaux, qui pérorent encore
aujourd’hui sur sa nécessité, les puissances ayant confisqué la
« communauté internationale » ont voulu instaurer le tribunal
international concernant l’assassinat de Hariri pour détruire la
résistance armée au Liban et tous ceux qui la soutiennent, Etats
et peuples. En falsifiant des données, en inventant et
s’appuyant sur des faux témoins, le tribunal international
qu’ils ont instauré est devenue une arme « légale » contre le
Hezbollah, après qu’il ait été une arme contre la Syrie. Au gré
des volontés politiques des grandes puissances, le tribunal
international modifie ses données et ses témoins. Il n’a jamais
voulu prendre en compte, même pas une seconde, l’explication
possible de la responsabilité sioniste dans l’assassinat de
Hariri.
Il faut se poser la question de savoir pourquoi la « communauté
internationale » n’a pas instauré un tribunal pour découvrir et
juger les assassins du président Arafat. Bien que les assassins
soient connus dans les deux cas, et qu’ils soient les mêmes (à
moins de prouver le contraire), la cause de leur assassinat
n’est pas la même : pour Arafat, son assassinat ouvrait la porte
à l’abandon des « constantes » palestiniennes et permettait
d’installer au pouvoir le concepteur des accords d’Oslo, un
homme qui n’a aucune foi dans la résistance, bref, un homme qui
a remis toutes les cartes palestiniennes entre les mains des
Etats-Unis. Pour Hariri, son assassinat ouvrait grande la porte
à une instabilité politique interne pouvant entraîner la
destruction de la résistance ou du moins son éloignement du
champ de bataille contre l’Etat sioniste.
Si pour l’assassinat de Arafat, la « communauté internationale »
s’est tue, c’est parce qu’elle ne souhaite pas que la découverte
de son assassinat dévoile toutes les implications locales,
régionales et internationales d’un tel acte, dont l’ampleur
pouvait déstabiliser plus d’une personnalité ou d’un pouvoir
alliés. Mais puisque l’instabilité du Liban est recherchée pour
déstabiliser la résistance et lui supprimer son environnement
protecteur, le tribunal international fut conçu de manière à
poursuivre cet effort de déstabilisation. Dans les deux cas, la
vérité a été refusée car elle pourrait mener au principal
fauteur de troubles dans la région, l’Etat sioniste. Dans le cas
du Liban, et parce que la résistance du Hezbollah menace la
suprématie de l’Etat sioniste, c’est l’instabilité politique qui
est recherchée. Dans le cas de la Palestine, parce que les
successeurs du président assassiné assument le rôle qui leur a
été fixé par les puissances impériales, c’est la stabilité
assurant la tranquillité de l’occupant qui est exigée.
Les Palestiniens qui réclament aujourd’hui l’instauration d’un
tribunal international pour découvrir et juger les assassins du
président Arafat sont en droit de le réclamer. Mais à moins de
changer le rapport de forces sur le terrain, la « communauté
internationale » fera la sourde oreille car, comme pour la
question des faux témoins discutée au conseil des ministres
libanais, il y a des dossiers tellement graves qu’ils font
tomber des têtes et des pouvoirs, locaux et régionaux. Cette
réclamation a au moins le mérite de montrer l’hypocrisie et la
complicité de ce qui s’est auto-proclamé « communauté
internationale ».
Article publié sur Résistance islamique au Liban
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