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Libye

Libye : Réflexions sur une guerre
Demba Moussa Dembélé


Photo: Picasaweb

Lundi 12 septembre 2011

La guerre contre la Libye lancée par l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), sous prétexte de « protéger les populations civiles », marque un tournant très dangereux dans les relations entre l’Afrique et les pays occidentaux, notamment la France, les Etats-Unis et la Grande Bretagne, les principaux protagonistes de cette équipée impérialiste contre un Etat africain souverain.

« SOULEVEMENT POPULAIRE» OU AGRESSION IMPERIALISTE?

Au début des évènements en Libye, on avait cru à la contagion des soulèvements populaires en Tunisie et en Egypte. Mais quelque temps après, on s’est rendu compte qu’il y avait de grandes différences avec ces mouvements. En Libye, le soulèvement avait pour origine Benghazi, fief de l’ancien roi Idriss, déposé par Kadhafi en 1969. Un soulèvement tribal contre Tripoli. En outre, contrairement à ce qui s’est passé en Tunisie et en Egypte, les principaux chefs « rebelles » sont d’anciens ministres ou hauts responsables du régime de Kadhafi. On dit que le président du CNT, Mustapha Abdul Jelil, était même ministre de la Justice jusqu’au mois de février 2011 ! Dans ces conditions, les évènements en Libye ressemblaient plus à une tentative de « révolution de palais » qu’à un « soulèvement populaire ».

Par ailleurs, le quotidien britannique « Guardian », dans son édition du 24 août, nous apprend que « ces sont les principaux pays de l’OTAN qui ont soutenu et financé le CNT, qui comprend des membres liés de longue date à la CIA et au M15 [le service secret britannique, DMD] ». C’est pourquoi ces puissances occidentales avaient aidé le CNT à créer une société pétrolière en vue de remplacer la compagnie étatique libyenne et une « Banque centrale libyenne » avec l’aide du géant britannique de la banque, HSBC. Une équipe de haut niveau de cette institution financière avait d’ailleurs été dépêchée à Benghazi dans ce but.

Ainsi, l’appel à une intervention extérieure par le CNT était la suite logique de la coordination étroite entre celui-ci et les pays occidentaux. Ces derniers y avaient vu une occasion de se débarrasser du régime de Kadhafi et de reprendre pied dans un pays aussi stratégique, surtout après le traumatisme causé par la chute de deux dictateurs pro-occidentaux en Tunisie et en Egypte.

Comme on le constate, les évènements de Libye sont une opération planifiée avec des puissances étrangères en plus d’être une insurrection armée dès le début. Ils n’ont rien de spontané et rien à voir avec un soulèvement populaire, comme en Tunisie et en Egypte. .

Une fois les plans de l’intervention des puissances occidentales établis, il restait à la faire accepter à l’opinion. Ce fut le travail des grands médias occidentaux, dont la plupart sont contrôlés par les multinationales, et ceux des monarchies du Golfe comme Al Jazeera et Al Arabya. Ces médias seront utilisés à fond pour fabriquer des mensonges et manipuler l’opinion publique et même les Nations-Unies, afin de les préparer à une intervention militaire pour « protéger » des civils. Les prétendues menaces « d’extermination de civils » à Benghazi par l’armée de Kadhafi, utilisées comme prétexte pour obtenir la Résolution 1973, n’étaient que de l’intoxication. Selon le Guardian, Amnesty International et aussi Human Rights Watch ont émis par la suite des doutes sur la véracité de ces allégations.

Ainsi donc, le déroulement de la campagne de destructions massives et de terreur de l’OTAN a-t-elle montré que la « protection » des civils n’était que le voile servant à masquer le vrai objectif des Etats-Unis, de la France et de la Grande Bretagne : à savoir abattre le régime de Kadhafi pour installer à sa place un régime plus docile, qui serait « reconnaissant » à ses « protecteurs » occidentaux qui seraient ainsi amplement « récompensés » par le contrôle et le pillage des ressources de la Libye.

L’OTAN est une machine à tuer au service du capitalisme et de l’impérialisme occidental. C’est une menace contre la liberté des peuples, l’indépendance et la souveraineté des pays du Sud. Après ce qui s’est passé en Tunisie et en Egypte, l’intervention en Libye est destinée à canaliser d’autres soulèvements populaires, à défaut de pouvoir les étouffer, au profit des pays occidentaux. Car, les évènements en Tunisie et en Egypte ont pris de court et complètement déjoué les plans de l’impérialisme nord-américain et de ses alliés. Il fallait donc utiliser la Libye pour étouffer le virus du soulèvement populaire contre à la fois les dictateurs internes et leurs protecteurs extérieurs, c'est-à-dire l’impérialisme occidental.

UNE INTERVENTION MILITAIRE DECIDEE DE LONGUE DATE

Comme indiqué plus haut, l’argument de la « protection des civils » était une manière d’obtenir l’aval, ou plutôt la complicité des Nations-Unies, avec le vote de la Résolution 1973, pour donner une couverture légale à l’intervention des pays occidentaux. Cette intervention avait été décidée plusieurs semaines auparavant par les Etats-Unis, la France et la Grande Bretagne. Et le cours des évènements a montré que ces pays se sont servis du Conseil de Sécurité pour exécuter leur plan en violant délibérément les dispositions de la Résolution 1973. D’ailleurs, plusieurs journaux aux Etats-Unis et en Europe, et non des moindres, ont indiqué que les pays occidentaux avaient envoyé des forces spéciales et des agents de la CIA en Libye bien avant l’idée d’une « zone d’exclusion aérienne ». A ce propos, le quotidien britannique, Guardian, déjà cité, observe que « les services de renseignements et les forces spéciales des pays occidentaux avaient été envoyés sur le terrain des mois auparavant, en narguant des Nations Unies, pour former, planifier et coordonner les opérations des rebelles».

Le philosophe italien, Dominico Losurdo, cite un autre quotidien britannique, le Sunday Mirror, qui, dans son édition du 20 mars, révélait que «trois semaines» avant la résolution de l’ONU, étaient à l’œuvre en Libye des « centaines » de soldats britanniques, encadrés dans un des corps militaires les plus sophistiqués et les plus redoutés du monde (SAS). Des révélations similaires ont été rapportées par l’International Herald Tribune du 31 mars, parlant de la présence de « petits groupes de la CIA » et d’une «ample force occidentale en action dans l’ombre», « avant l’éclatement des hostilités le 19 mars ».

C’est pourquoi toutes les tentatives faites par la Chine, la Russie, membres permanents du Conseil de Sécurité, et surtout par l’Union africaine, ont été soit rejetées soit tout simplement ignorées. Parce que ces propositions appelaient à un règlement politique du conflit, une issue qui n’intéressait ni l’OTAN ni ses marionnettes du CNT. La destruction de la Libye et la chute de Kadhafi étaient la seule et unique solution recherchée par les Etats-Unis, la France et la Grande Bretagne.

UN BILAN ACCABLANT POUR L’OTAN

Comme indiqué plus haut, l’OTAN est un instrument au service des entreprises criminelles de l’impérialisme occidental ayant à sa tête l’impérialisme yankee. C’est le bras armé du capitalisme. Sous prétexte de « lutte contre le terrorisme » ou « d’intervention humanitaire », l’OTAN est devenue une machine à tuer pour renforcer le contrôle des pays occidentaux sur les ressources de la planète et préserver leur hégémonie, notamment celle de l’impérialisme nord-américain. Et pour remplir cette mission, tout est permis, y compris les crimes les plus abominables. On l’a observé en Afghanistan depuis 2001. Et maintenant c’est le tour de la Libye.

Un des chefs militaires rebelles a dit que le conflit avait fait au moins 50.000 morts ! Voilà un aspect du bilan macabre de l’intervention de l’OTAN, qui était censée « protéger » les civils et « sauver des vies »! Et ce chiffre exclut les dizaines de milliers de blessés, dont certains ne s’en remettront jamais. La quasi-totalité de ces victimes – morts ou blessés- est à mettre au compte des bombardements de l’OTAN dans sa folie destructrice contre la Libye. En effet, on estime à quelque 20.000 les sorties aériennes et à plus de 30.000 bombes larguées par cette organisation sur le territoire libyen, sans compter les tirs de missiles et les opérations menées par les drones à partir des Etats-Unis.

Le Guardian souligne : “Tandis que les puissances occidentales affirment qu’elles étaient en train de sauver des vies, des milliers sont morts sur le terrain, avec un nombre incalculable de civils tués par les attaques aériennes de l’OTAN, y compris 85 corps calcinés près de la ville de Zlitan » au début du mois d’août.

Les grands médias occidentaux ont été très discrets sur les chiffres annoncés par les rebelles, parce qu’ils contredisent les mensonges de l’OTAN qui prétendait intervenir pour «empêcher le massacre de civils »! Finalement, c’est elle qui a fini par les massacrer. En effet, pendant six mois, l’OTAN a semé la terreur, la désolation et la mort dans les rangs du peuple libyen. Des familles entières ont été décimées après le bombardement de prétendues «cibles militaires». Des populations ont été privées d’eau, d’électricité, de nourriture, de soins médicaux, dans le but de les amener à se «soulever» contre leur « dictateur » ! Des infrastructures vitales ont été détruites avec une sauvagerie gratuite!

Selon le bureau de coordination des Nations Unies pour les affaires humanitaires (OCHA), cité par le président de la Commission de l’Union africaine, le 26 août, le conflit a fait fuir de la Libye près de 750.000 personnes, dont 100.000 Libyens et près de 650.000 étrangers, dont plus de la moitié composée de ressortissants de pays voisins, qui travaillaient en Libye parfois depuis des décennies. A cela, il faut ajouter plus de 220.000 déplacés internes. Des gens qui ont tout perdu et qui doivent recommencer leur vie à zéro. Tel est donc le bilan catastrophique de l’agression barbare de l’OTAN contre la Libye.

La barbarie de l’OTAN est également illustrée par d’autres exemples rapportés par des journaux occidentaux. Le philosophe italien Dominico Losurdo cite l’International Herald Tribune qui rapporte dans son édition du 26 août: « Dans un campement au centre de Tripoli ont été retrouvés les corps criblés de balles de plus de 30 combattants pro-Kadhafi. Deux au moins étaient ligotés avec des liens en plastique, et ceci laisse penser qu’ils ont subi une exécution. Parmi ces morts, cinq ont été trouvés dans un hôpital de fortune ; l’un était sur une ambulance, étendu sur un brancard et ligoté par une ceinture et portant encore une perfusion intraveineuse dans le bras ». Mais l’OTAN s’est également signalée par la non assistance aux réfugiés en détresse et qui se noyaient en haute mer, fuyant ses bombardements et les exactions de ses affidés du CNT. Une attitude que même le gouvernement italien, pourtant membre de la coalition des croisés, avait dénoncée publiquement !

Selon le site du quotidien français Le Monde, au moins 1 500 personnes ont péri noyées pendant leur fuite dans des embarcations de fortune pour échapper à la guerre. Ainsi donc, en plus de ceux qui ont été écrasés sous les bombes à fragmentation ou à l’uranium appauvri, armes prohibées par les conventions internationales, l’intervention de l’OTAN a fait périr des milliers d’autres personnes qui seront sans doute mises au compte de «victimes collatérales» comme elle en produit tous les jours en Afghanistan/

QU’ATTEND DONC LA COUR PENALE INTERNATIONALE?

Au vu de ces crimes contre l’Humanité commis par l’OTAN, de nombreuses voix se sont élevées pour demander ce qu’attend la CPI pour ouvrir une enquête sur les actions de l’OTAN et des autres mercenaires à la solde du CNT. Une CPI qui a été si prompte à inculper Kadhafi et son fils sur la base des « témoignages » plus que douteux rapportés par les médias occidentaux et des ONG des « droits de l’homme », souvent au service de la « mission civilisatrice « de l’impérialisme occidental! Les éléments sur lesquels s’est basée la CPI pour inculper Kadhafi ont été contestés par l’International Crisis Group qui avait pourtant envoyé une mission d’enquête sur le terrain!

En vérité, la CPI est un instrument au service du système impérialiste, jouant le même rôle que l’OTAN contre les peuples du Sud. Donc, il n’y a rien à attendre de ce côté-là. D’autant plus que toute enquête sérieuse sur les crimes perpétrés par l’OTAN mènerait directement à Barack Obama, Nicolas Sarkozy et David Cameron, qui ont planifié cette agression et donné les ordres pour détruire la Libye et mettre ainsi la main sur un pays aussi stratégique, surtout après les changements intervenus dans les deux pays voisins que sont la Tunisie et l’Egypte!

PROBLEME DE LEGITIMITE POUR LE CNT

Ayant été porté au pouvoir par une coalition de mercenaires composés des forces de l’OTAN, de leurs forces spéciales, d’agents de la CIA, de combattants d’Al Qaeda et des monarchies du Golfe et de l’Arabie Saoudite, le CNT aura un grand problème de crédibilité et même de légitimité auprès du peuple libyen. En effet, l’appel à l’intervention extérieure montre clairement que le CNT ne jouissait pas de soutien populaire capable de faire tomber le régime de Kadhafi, contrairement à ce qui s’est passé en Tunisie et en Egypte. En outre, comment un mouvement de « libération » peut-il être légitime quand il fait appel à des puissances extérieures pour détruire les infrastructures vitales de son pays et faire massacrer ses propres compatriotes ? D’ailleurs, Le Guardian observe à ce sujet: «il est clair qu’une implication aussi étroite des Etats-Unis et des anciennes puissances coloniales va entacher et saper la légitimité de la transformation en Libye ».

Outre le fait d’avoir été installé par une force étrangère, le CNT est un regroupement très hétéroclite, composé d’islamistes radicaux liés à Al Qaeda, de royalistes, de tribalistes et de représentants de la petite bourgeoisie. Ce mélange détonnant risque de poser des problèmes de cohabitation entre factions n’ayant pas nécessairement les mêmes objectifs sur l’avenir de la Libye après la guerre. Par ailleurs, l’image du CNT a été ternie par l’attitude foncièrement raciste observée à l’égard des Libyens noirs et des Africains au Sud du Sahara qui travaillaient en Libye. Quand les médias étrangers au service de l’agression impérialiste développent une campagne raciste et abjecte contre ces Africains, tous considérés comme des « mercenaires » de Kadhafi, c’est d’abord pour masquer la nature criminelle de la coalition qui a porté le CNT au pouvoir. Ensuite, leur campagne tend à justifier les massacres perpétrés contre ces Africains, comme l’ont rapporté plusieurs médias indépendants, dont Michel Collon, journaliste d’investigation bien connu, qui avait rencontré certains de ces Africains lors de sa visite à Tripoli.

L’International Herald Tribune du 2 septembre rapporte que des rebelles continuent de rafler tous les libyens à la peau noire et les Africains au Sud du Sahara. Comme quoi la « nouvelle Libye » installée par l’OTAN semble s’engager dans la voie de « l’épuration ethnique » pour se débarrasser de ses propres ressortissants noirs!

OCCUPATION ET PILLAGE DES RESSOURCES DE LA LIBYE

Une « nouvelle Libye » se dessine, qui sera sous la coupe réglée des « protecteurs » du CNT, en dépit de ce qu’en dira ce dernier, car il ne pourra rien leur refuser. D’ailleurs, en a-t-il les moyens? Nullement. Comme on l’a déjà souligné plus haut, le but véritable de l’agression impérialiste des principaux pays membres de l’OTAN est le contrôle des ressources de la Libye et la recherche de bases militaires dans un pays hautement stratégique, surtout après la « perte » éventuelle de l’Egypte par les Etats-Unis.

En détruisant à grande échelle les infrastructures libyennes, les pays occidentaux sont assurés de se servir des immenses ressources pétrolières de la Libye pour faire travailler leurs entreprises pour « reconstruire » le pays. Une « reconstruction » qui, selon les rebelles, pourrait prendre au moins dix ans! Donc, les entreprises occidentales sont assurées d’obtenir des marchés pour plusieurs années et créer ainsi des emplois pour leurs ressortissants. Ce qui pourrait donner l’illusion d’une embellie pour le marché de l’emploi aux Etats-Unis et en France, deux pays avec des présidents très impopulaires et qui seront en période électorale en 2012 !

Comme quoi, il n’y a rien « d’humanitaire » dans cette guerre d’agression contre la Libye. Il faut être vraiment naïf, et même niais, pour croire un seul instant que Sarkozy, Obama, Cameron ou encore le dépravé sexuel Silvio Berlusconi, tous confrontés à des crises économiques et financières sans précédent, vont dépenser des millions de leurs devises chaque jour et risquer la vie de leurs pilotes et autres agents secrets, juste pour « protéger » des Libyens. Comment des gouvernements qui édictent des politiques carrément racistes et xénophobes, notamment à l’encontre des immigrés de confession musulmane peuvent-ils faire croire qu’ils se soucient du sort du peuple libyen?

Le philosophe italien Dominico Losurdo observe à juste titre que « Cette guerre n’a rien à voir avec la protection des droits humains. » Il cite un journal italien, La Stampa, qui souligne que c’est pour des intérêts purement économiques que l’Italie et les autres pays de l’OTAN sont intervenus en Libye. Et ce même journal prédit déjà une « guerre économique » entre la France et l’Italie, une fois que l’OTAN aura accompli sa sale besogne. Ainsi dans son édition du 26 août, La Stampa écrit, faisant allusion à la France : « on a immédiatement compris que la guerre contre le Colonel allait se transformer en un conflit d’un autre type: guerre économique, avec un nouvel adversaire, l’Italie évidemment ».

De fait, la réalité n’a pas tardé à prendre le dessus sur la fiction et les mensonges. Un article du New York Times du 23 août nous apprend que la guerre n’est même pas encore finie que déjà a commencé la course pour le contrôle du pétrole libyen. Sous la plume de Clifford Krauss, le journal écrit, “la bataille n’est même pas encore terminée à Tripoli, que la course pour l’accès aux richesses pétrolières libyennes a déjà commencé…Les nations occidentales, en particulier les pays de l’OTAN qui ont accordé un soutien aérien déterminant aux rebelles, veulent s’assurer que leurs entreprises seront en pôle position pour pomper le pétrole libyen » Et l’article cite le ministre italien des Affaires étrangères, Franco Frattini, qui souligne que la compagnie italienne ENI « jouera un rôle de premier plan dans l’avenir » en Libye. Mais apparemment, certains des ses homologues ne l’entendent pas de cette oreille. En effet, comme une réponse indirecte aux déclarations de Frattini, Alain Jupé, le ministre français des Affaires étrangères, a comparé l’intervention de la France en Libye à « un investissement dans l’avenir ».Un avenir qui se conjuguera sans doute en contrats juteux pour les entreprises françaises au nom de la « reconstruction » de la Libye mais dont le vrai objectif sera de mettre la main sur une bonne partie du pétrole et du gaz libyens!

Le quotidien français Libération, du jeudi 1er septembre, nous apprend qu’il y a eu un accord secret entre la France et le CNT, conclu le 3 avril 2011, qui promet 35% du pétrole libyen à la France en échange d’un soutien total et permanent de celle-ci à la rébellion ! Ainsi l’on comprend mieux « l’investissement dans l’avenir » dont parlait Alain Juppé, et surtout l’activisme du président Sarkozy dans la guerre d’agression contre la Libye! Mais Frattini, cité dans un autre quotidien français Le Figaro du 2 septembre, prévient : « il n’y aura pas de bataille de type coloniale entre l’Italie et la France pour s’emparer des richesses de la Libye. L’Italie restera un partenaire privilégié de Tripoli. Ne venez pas chasser dans notre réserve. » Dans le même temps, le numéro du New York Times, déjà cité, rapporte les propos d’Abdeljalil Mayouf, porte-parole de la compagnie pétrolière créée par le CNT, qui affirme que des pays comme la Chine, la Russie et le Brésil pourraient être « punis » pour avoir critiqué l’intervention de l’OTAN et proposé une solution politique.

Comme quoi le voile de mensonges et de désinformation sur les vraies raisons de la guerre de l’OTAN contre la Libye commence à se déchirer petit à petit. Ceux qui ont été abusés par les discours sur la protection des « droits de l’homme » et la promotion de la « démocratie » comprendront alors que c’est la protection des droits de propriété sur les richesses libyennes qui constitue la force motrice fondamentale de l’agression de l’OTAN contre la Libye!

OBSTRUCTIONS A LA MEDIATION DE L’UNION AFRICAINE

Tout occupée à atteindre ses objectifs de changement de régime, l’OTAN, avec la complicité des Nations Unies, a rejeté systématiquement tous les appels au cessez-le-feu et à la négociation formulés par l’Union africaine. L’OTAN a même tout fait pour entraver les efforts des pays africains auprès du CNT, en empêchant la visite des chefs d’Etat mandatés par l’UA au tout début des frappes aériennes ou en soumettant Tripoli à d’intenses bombardements durant le séjour de ces derniers.

Les Etats-Unis, la France et la Grande Bretagne ont non seulement ignoré les propositions de l’Afrique mais également tenté de diviser celle-ci en se servant de certains de leurs pions ou marionnettes pour affaiblir la position de l’Union africaine. Dans ce registre, le président Wade du Sénégal s’est distingué d’une manière honteuse et grotesque. Il s’est mis sans vergogne au service de l’agression impérialiste contre un pays africain souverain. Il fut le premier chef d’Etat africain à trahir Kadhafi, dont il était pourtant l’un des plus fervents courtisans. Et aussi l’un des partisans les plus zélés dans le débat sur les Etats-Unis d’Afrique ! Son voyage à Benghazi, préparé et encadré par la France et à partir de Paris, a couvert de ridicule le Sénégal au sein de l’opinion africaine. Et pour davantage satisfaire ses maîtres occidentaux, Wade vient de déclarer -encore à Paris- qu’il est partisan du « droit d’ingérence », c'est-à-dire le soutien à des interventions impérialistes en Afrique pour la recoloniser sous le prétexte de « protection des droits humains » et « de promotion de la démocratie »! Un quotidien sénégalais l’a qualifié à très juste titre de « honte africaine » !

Le refus de l’OTAN d’écouter la voix de l’Afrique sur une question aussi essentielle qui concerne un autre pays africain, témoigne à n’en pas douter du manque total de respect, voire du mépris, de la part des Etats-Unis, de la France et de la Grande Bretagne, notamment, à l’égard de l’Union africaine. Ce faisant, ils ont démontré qu’avec les pays africains ce sont eux qui dictent la conduite à observer et non l’Union africaine. Les obstructions répétées des pays de l’OTAN pour saper la médiation de l’Union africaine montrent que les discours sur le respect de la souveraineté des Etats n’ont aucune valeur dans la bouche des dirigeants occidentaux quand on est faible et désuni.

La leçon à retenir ici est que l’Union africaine n’existe pas encore dans la réalité. Non seulement, elle a été impuissante à infléchir l’attitude des pays membres de l’OTAN mais certains de ses propres membres ont déjà accepté le fait accompli en reconnaissant le CNT alors que le Conseil de Paix et de Sécurité de l’UA a refusé jusqu’à présent de le faire. .

DIABOLISER LES DIRIGEANTS AFRICAINS POUR MIEUX SERVIR LES DESSEINS DE L’IMPERIALISME

Le refus de prendre en compte la position de l’Afrique découle du manque de respect, voire du mépris, que les dirigeants occidentaux éprouvent à l’égard des dirigeants africains. Ces derniers sont presque toujours diabolisés par les médias occidentaux, les présentant presque tous comme des « dictateurs», des « corrompus » et des « oppresseurs » de leurs peuples. Et ce sont les pays occidentaux qui se chargeraient de « protéger », voire de « sauver », les pauvres peuples africains de ces « dictateurs », de ces oppresseurs », de ces « tyrans » !

Il y a certes des dictateurs en Afrique, mais la plupart sont les « protégés » des puissances occidentales. Aussi longtemps qu’ils servent loyalement les intérêts de ces dernières, on continue à les protéger et même à les présenter sous des dehors de « démocrates ». Ce n’est que quand ces dictateurs n’arrivent plus à servir les intérêts de leurs maîtres qu’on les lâche, tout en cherchant à assurer leur relève, dans la mesure du possible. Le cas le plus récent est celui de Moubarak lâché par les Etats-Unis pour essayer de sauver leurs intérêts non seulement en Egypte mais aussi dans toute la région, pour surtout protéger Israël.

Mais en général, ce sont les dirigeants qui résistent aux puissances occidentales qui sont souvent diabolisés, vilipendés et font l’objet de plans de déstabilisation, voire d’assassinat pur et simple! Par exemple, Tony Blair, ancien Premier ministre britannique, a révélé dans ses Mémoires qu’il avait envisagé d’attaquer le Zimbabwe pour faire tomber le régime de Robert Mugabe, sous prétexte de défense « des droits de l’homme ». Mais le vrai motif était d’installer un gouvernement « ami » dans ce pays qui reviendrait sur le programme de redistribution des terres qui appartenaient à une minorité blanche d’origine britannique!

Avec la Libye, les dirigeants occidentaux sont passés des intentions aux actes. L’intervention de l’OTAN a été préparée et accompagnée par une campagne médiatique odieuse pour non seulement la légitimer mais également justifier tous les meurtres perpétrés par cette organisation contre la famille Kadhafi et des populations civiles innocentes que les pays occidentaux prétendaient « protéger ». La campagne médiatique contre Kadhafi s’est même intensifiée après la chute de Tripoli. Les atrocités commises par l’OTAN et ses supplétifs sont attribuées aux « pro-Kadhafi ».C’est ainsi que des corps calcinés, qui ne peuvent être que le fait de bombardements par l’OTAN, sont attribués aux « pro-Kadhafi ». Et même maintenant, on accuse Kadhafi, ses fils et ses soldats de viol sur les « amazones libyennes » ! Les journaux africains ont repris sans discernement des articles relatant de tels « viols » publiés dans Le Figaro, le principal quotidien de la droite française, qu’un journaliste français avait qualifié à juste titre de « quotidien du peuple sarkozyste» !

Tous ces ragots se révéleront complètement faux et infondés mais l’objectif aura été atteint : traîner dans la boue Kadhafi et sa famille et soulager la « bonne conscience » occidentale d’être intervenue pour débarrasser le « peuple libyen » d’un tel « dictateur » ! Le philosophe italien Losurdo, déjà cité, observe encore : « Barbare comme toutes les guerres coloniales, la guerre actuelle contre la Libye démontre comment l’impérialisme se fait de plus en plus barbare. Dans le passé, innombrables ont été les tentatives de la CIA d’assassiner Fidel Castro, mais ces tentatives étaient conduites en secret, avec un sentiment si ce n’est de honte du moins de crainte des possibles réactions de l’opinion publique internationale. Aujourd’hui, par contre, assassiner Kadhafi ou d’autres chefs d’Etat non appréciés à l’Occident est un droit ouvertement proclamé. Le Corriere della Sera du 26 août 2011 titre triomphalement: «Chasse à Kadhafi et à ses fils, maison par maison».

Et cette campagne est non seulement destinée à faire oublier les crimes monstrueux commis par l’OTAN et les autres mercenaires au service du CNT, mais elle vise également à justifier l’éventuel assassinat de Kadhafi que l’OTAN avait cherché à tuer dès le début de son intervention, comme l’illustre l’assassinat d’un de ses fils et de trois de ses petits-fils. Maintenant, le CNT a mis la tête de Kadhafi à prix, promettant une récompense à toute personne qui tuerait ce dernier ! Et les médias occidentaux le répètent à l’envi, sans la moindre retenue. Et sans la moindre objection de la part des Obama, Sarkozy et Cameron!

A travers cette campagne médiatique odieuse, c’est toute la barbarie d’une prétendue « civilisation » qui s’exprime au grand jour, exposant ainsi la nature perverse, terroriste, tyrannique et despotique de l’impérialisme et du capitalisme en crise.

Pourquoi les Africains devraient-ils accepter cela ? Quel que soit ce que l’on peut penser de Kadhafi ou de tel autre dirigeant africain, on ne devrait pas accepter ce qui est une véritable abomination, à savoir la diabolisation systématique des dirigeants africains par les dirigeants occidentaux qui se posent en moralisateurs, tout imbus de la prétendue « supériorité » de leur système, de leur « civilisation ». Une civilisation dont l’influence s’est propagée dans le monde à travers des génocides et des massacres en série de peuples non Européens, de l’Afrique aux Amériques en passant par l’Asie, de la destruction de leurs cultures et du pillage de leurs ressources.

Ecoutons à ce sujet ce que Césaire et Fanon disaient de cette « civilisation occidentale » qui prétend être « supérieure » aux autres civilisations humaines. Dans Discours sur le colonialisme, Césaire souligne que « l’entreprise coloniale est, au monde moderne, ce que l’impérialisme romain fut au monde antique : préparateur du Désastre et fourrier de la Catastrophe » (p. 55). La critique de Frantz Fanon, dans Les Damnés de la terre, est encore plus acerbe, plus dévastatrice : « Quittons cette Europe qui n’en finit pas de parler de l’homme tout en le massacrant partout où elle le rencontre, à tous les coins de ses propres rues, à tous les coins du monde. Voici des siècles que l’Europe a stoppé la progression des autres hommes, les a asservis à ses desseins, à sa gloire ; des siècles qu’au nom d’une prétendue « aventure spirituelle » elle étouffe la quasi-totalité de l’humanité… L’Occident a voulu être une aventure de l’Esprit. C’est au nom de l’Esprit, de l’esprit européen s’entend, que l’Europe a justifié ses crimes et légitimé l’esclavage dans lequel elle maintenait les quatre cinquièmes de l’humanité » (p.301 & 303).

Ces jugements sans appel, ont été prononcés il y a plus d’un demi-siècle. Et c’est toujours au nom de « l’esprit européen » que les chevaliers de la « civilisation occidentale » se permettent de juger les autres et de leur donner des leçons. Mais à y regarder de près, ils sont plus despotiques, plus tyranniques et plus immoraux que ceux qu’ils vouent aux gémonies en Afrique ou dans les autres pays du Sud.

LES DICATEURS ET LES TYRANS SE TROUVENT AUSSI EN OCCIDENT

Selon le dictionnaire Le Robert illustré (édition 2012, page 551), la dictature est « la concentration du pouvoir entre les mains d’un individu, d’une assemblée, d’un parti, d’une classe.» En Europe, la concentration du pouvoir économique et financier entre les mains d’une minorité de plus en plus réduite a renforcé la dictature du capital sur le travail et sur la société tout entière. De sorte que les élus, présidents, premiers ministres, députés, sont devenus des agents au service des marchés financiers et des multinationales. En France, malgré l’opposition de l’écrasante majorité du peuple français, illustrée par des grèves massives et d’une ampleur sans précédent, Sarkozy est passé outre et a imposé la réforme du système de retraite pour satisfaire les marchés financiers. N’est-ce pas la manifestation de la dictature d’une classe ?

Aux Etats-Unis, Barack Obama a renié une bonne partie de ses promesses sous la pression de la même dictature de classe incarnée par Wall Street, le siège de la Bourse de New York. Et que dire alors de Silvio Berlusconi, le premier ministre italien, un homme qui a utilisé son argent et son empire médiatique pour se faire élire et réélire en dépit de tous les scandales financiers, politiques et sexuels qui l’accablent ? Et il a utilisé et continue d’utiliser son pouvoir pour entraver la justice, bafouer les règles de l’Etat de droit! C’est un homme profondément immoral et corrompu qui s’est payé les services d’une prostituée, mineure de surcroît ! Et dans l’impunité la plus totale ! Alors, au nom de quoi, ces dictateurs, dépourvus de toute valeur éthique et morale, devraient-ils faire la leçon aux Africains et à leurs dirigeants?

Les dirigeants occidentaux sont l’incarnation de la décadence d’une classe cynique, arrogante et immorale. Un autre exemple de la dépravation des classes dirigeantes occidentales nous a été fourni par Dominique Strauss-Kahn. Voilà un homme qui se préparait à se présenter à l’élection présidentielle en France, qui « saute », littéralement, sur une femme de chambre dans un hôtel et au moment où il s’apprêtait à aller prendre son avion ! Et sur une Africaine, de surcroît! Sans doute, a-t-il pensé qu’elle n’oserait pas parler, et que même si elle le faisait, personne ne croirait son récit face à un « homme puissant et fortuné » comme lui ! Mais le courage de Nafissatou Diallo a exposé à la face du monde la profondeur de la déchéance morale et humaine de ce délinquant et pervers sexuel. Voilà un homme qui aurait pu diriger la France et se donner le beau rôle en revêtant le manteau d’un moraliste, d’un « défenseur » des droits humains pour aller faire la leçon aux dirigeants africains!

En vérité, Dominique Strauss-Kahn, Sarkozy, Obama, Cameron ou encore Berlusconi se comportent ainsi parce qu’ils se croient au-dessus des lois. Ils croient qu’ils peuvent tout se permettre surtout dans leurs relations avec l’Afrique ou les autres pays du Sud. Et on ne peut que soutenir cette affirmation du philosophe Dominico Losurdo, quand il observe que «les monarques absolus» de notre époque, les tyrans et dictateurs planétaires de notre époque siègent à Washington, à Bruxelles et dans les plus importantes capitales occidentales. » En effet, seuls des dictateurs et même des monarques, peuvent s’arroger le droit de violer délibérément les Résolutions de l’ONU, comme celles sur la Libye. Seuls des dictateurs peuvent se permettre de refuser d’écouter les appels au cessez-le-feu des pays africains et même de membres permanents du Conseil de Sécurité, comme la Chine et la Russie, pour la résolution pacifique de la crise et sauver des vies.

En s’entêtant, les dictateurs occidentaux ont fait massacrer plus de 50.000 morts, chiffre sans doute provisoire et inférieur à la réalité, et ont laissé un pays complètement détruit. Seuls des dictateurs, des despotes peuvent s’arroger le droit de faire tomber des Chefs d’Etat de pays souverains, comme en Libye, ou d’exiger leur départ, comme en Syrie ou ailleurs. Si ces comportements ne sont pas du despotisme, de la tyrannie, alors les mots n’ont plus aucun sens !

« LE DROIT D’INGERENCE HUMANITAIRE »: UNE IMPOSTURE !

L’intervention militaire en Libye serait une illustration du « droit d’ingérence humanitaire », la nouvelle trouvaille de l’impérialisme, avec la complicité des Nations-Unies, ou plutôt du Conseil de Sécurité, pour recoloniser les pays africains. En effet, la guerre contre la Libye va porter un coup terrible à la souveraineté de ce pays et mettre ses richesses entre les mains des pays de l’OTAN, comme on l’a vu plus haut. Après ce qui s’est passé en Libye, le danger de recolonisation de certains pays africains n’est plus une vue de l’esprit. Ceux qui avaient encore des doutes sur la réalité de l’impérialisme et de sa nature perverse, despotique, terroriste et barbare, doivent se réveiller. La Libye doit faire taire leurs doutes et balayer leurs illusions. La Libye est un test majeur pour l’Afrique. Et cela, quel que soit ce que l’on peut penser de Kadhafi et de son régime.

Vu la crise profonde qui secoue les principaux pays capitalistes et face au grand défi à leur l’hégémonie que représentent les pays émergents, il est clair que leur survie dépendra dans une très large mesure du contrôle qu’ils pourront exercer sur les ressources du continent africain, pratiquement la seule région du monde où malheureusement les pays occidentaux peuvent encore dicter leur loi!

La création d’AFRICOM par les Etats-Unis fait partie de cette stratégie de contrôle des ressources de l’Afrique par l’installation de bases militaires sur le sol africain. Sous prétexte de « lutte contre le terrorisme » en Afrique, AFRICOM est en train de tisser sa toile dans les pays africains à coup de manœuvres militaires, de programmes sociaux et de subtile propagande médiatique, dans le but de gagner les cœurs et les esprits des Africains, notamment des dirigeants et d’une certaine « élite » occidentalisée. Tout cela vise à masquer la vraie mission d’AFRICOM qui est de promouvoir les intérêts stratégiques, économiques et politiques de l’impérialisme yankee en Afrique, en exerçant notamment son contrôle sur une bonne partie des ressources du continent et en disposant de points d’appui militaires dans certains pays ou régions-clés. Kadhafi avait été parmi les chefs d’Etat africains les plus vigoureusement opposés à une présence militaire des Etats-Unis sur le sol africain. Kadhafi avait aussi fermé toutes les bases militaires en Libye après sa prise de pouvoir en 1969.

Qu’en sera-t-il des membres du CNT ? C’est un secret de polichinelle que l’un des objectifs de l’intervention de l’OTAN est la possibilité d’une réouverture de certaines des bases qui avaient été fermées par Kadhafi. D’ailleurs, Le Guardian, cité plus haut, souligne que le fait que le gouvernement britannique dise ne pas exclure la possibilité d’envoyer des troupes en Libye pour aider à « stabiliser » la situation est une indication de la volonté des pays occidentaux de reprendre pied militairement en Libye.

DECONSTRUIRE LE DISCOURS DE L’IMPERIALISME

Quand donc les dirigeants africains et leur « élite » comprendront-ils que le discours sur la « démocratie » et les « droits de l’homme » n’est qu’un vernis, ou plutôt l’emballage qui cache la vraie nature de la marchandise, à savoir la stratégie impérialiste de domination de l’Afrique et du reste du monde. En réalité, quand les dirigeants occidentaux se retrouvent en tête-à-tête, ils ne perdent pas de temps à discuter des vertus supposées de la démocratie dans les pays du Sud. Ils parlent plutôt de questions géostratégiques majeures, du renforcement de leur hégémonie. En un mot, des moyens de renforcer leur domination sur le reste du monde. Et cela passe par le contrôle des ressources de la planète à leur profit et l’occupation de points stratégiques dans les pays du Sud et dans d’autres endroits du Globe. Et les moyens de réalisation de cette stratégie sont l’OTAN, l’Armée des Etats-Unis, et les armées de quelques pays européens.

Mais pour vendre cette stratégie à l’opinion publique, on sortira le discours sur les « droits de l’homme » et la « démocratie ». C’est ce qui s’est passé dans le cas de la Libye. Mais pas plus qu’en Afghanistan ou ailleurs, l’OTAN n’apportera la « démocratie » à la Libye. Même dans les pays occidentaux, les droits de l’homme sont aujourd’hui bafoués, soumis aux impératifs de la « lutte contre le terrorisme ». C’est le cas notamment aux Etats-Unis. Quant à la démocratie, elle a été vidée de son contenu originel. Partout, c’est la « démocratie de marché » qui domine. Des dirigeants élus se mettent au service des marchés financiers et des multinationales, en reniant toutes les promesses faites à leurs citoyens et en leur imposant toutes sortes de sacrifices afin de « calmer les marchés »! La France, l’Espagne, le Portugal, l’Italie et surtout la Grèce sont des cas d’école en Europe. Et que dire des Etats-Unis sous Obama, dont le slogan «Yes, We Can » s’est transformé en « No, I Can’t »!

Quand on trahit les idéaux démocratiques et qu’on bafoue les droits de l’homme chez soi, comment peut-on avoir l’outrecuidance, l’impudence, l’arrogance de prétendre exporter la démocratie et protéger les droits de l’homme ailleurs? Mais si « le doit d’ingérence humanitaire » est une doctrine destinée à secourir les populations opprimées, partout dans le monde, comment se fait-il qu’elle ne s’applique pas à la Palestine ? Un peuple occupé, privé de ses droits les plus élémentaires, soumis à une oppression monstrueuse et à l’extermination quotidienne de la part de l’Etat d’Israël. La réponse, tout le monde la connaît: Israël se comporte en hors-la-loi international et exerce impunément une politique de terreur sur les Palestiniens, parce qu’il bénéficie du soutien inconditionnel des pays occidentaux, notamment des Etats-Unis.

Cette « exception palestinienne » montre bien que «le droit d’ingérence humanitaire » est une stratégie réservée principalement à l’Afrique pour la recoloniser et mettre la main sur ses ressources. C’est une abomination, une imposture et les Africains doivent la considérer comme telle ! En effet, la doctrine de «droit d’ingérence humanitaire » est la version moderne du « fardeau de l’homme blanc » qui avait servi de force motrice à la colonisation de l’Afrique au 19e siècle, dans le but de « civiliser » ses populations « sauvages » ! On sait ce que cette entreprise « civilisatrice » a produit : des génocides en série, des massacres à répétition, la destruction des cultures autochtones, le pillage éhonté des ressources et du patrimoine de l’Afrique. « Le droit d’ingérence humanitaire » vise les mêmes objectifs. A la place de la « civilisation » on évoque la « protection » des populations contre leurs « dictateurs », leurs « tyrans » ! .

AFRIQUE, REVEILLE-TOI !

La naïveté de nombre de dirigeants africains et la veulerie d’une certaine « élite » africaine « occidentalisée » risquent de faciliter la tâche de recolonisation du continent par les pays occidentaux. On en a eu l’illustration par le soutien apporté à l’intervention de la France en Côte d’Ivoire, permettant ainsi à celle-là de reconquérir un des piliers de la Françafrique et de renforcer ainsi sa mainmise sur les ressources ivoiriennes ainsi que sa présence militaire en Afrique de l’Ouest.

Dans le cas de la Libye, la même « élite », croyant aux balivernes des dirigeants occidentaux sur la « défense des droits de l’homme » et la « démocratie », a applaudi à l’agression de l’OTAN contre un pays africain souverain. Et l’installation du CNT au pouvoir par l’OTAN dans une Libye occupée, remplie de « conseillers militaires » et de mercenaires occidentaux, appelés « société de services », comme Black Water en Iraq, sera sans doute saluée comme «l’avènement de la démocratie»! Et à ceux qui auraient quelques états d’âme sur cette occupation, les médias occidentaux se chargeront de les « ramener à la raison » en insistant sur la nécessité de prévenir tout « retour possible » de Kadhafi, toute « menace » de la part de ses « loyalistes » qui seraient encore actifs en Libye. Ou encore, on insistera sur la nécessité « d’aider » le CNT à se débarrasser des combattants d’Al Qaeda, déguisés en « rebelles ».

Tel est le drame de l’Afrique: des dirigeants naïfs, faciles à manipuler et toujours prêts à imiter ou servir leurs tuteurs, comme le président Wade en a donné l’exemple, une certaine « élite » sensible à la propagande sur « la démocratie » et les « droits de l’homme » ! Il est temps que les Africains se ressaisissent. Et heureusement, il y a une partie de plus en plus importante de l’opinion en Afrique et dans la Diaspora qui comprend les véritables intentions des pays occidentaux que tentent de masquer les discours lénifiants sur la « démocratie » et les « droits de l’homme ». Les consciences commencent à se réveiller. Les intellectuels, le mouvement social, les artistes, les musiciens et autres hommes et femmes de culture contribuent à cet éveil. Ils ont été capables de déconstruire le discours du système impérialiste et d’exposer sa stratégie de recolonisation du continent africain. Ils ne cessent d’appeler les dirigeants et peuples africains à se mobiliser pour faire échec à cette stratégie.

Le cas de la Libye doit servir de déclic. Quels que soient les sentiments à l’égard du régime de Kadhafi, ce qui s’est passé en Libye est inacceptable. L’enjeu est la défense de l’indépendance et de la souveraineté d’un pays africain. Si les Africains se taisent et ferment les yeux sur ce cas, d’autres suivront et le processus de reconquête de l’Afrique continuera sous le prétexte de « protection des civils » contre leurs « dictateurs »! Il est temps de se réveiller! Partout ailleurs, les peuples sont en train de prendre leur destin en main en secouant le joug de la domination impérialiste. En Amérique latine, que l’impérialisme yankee appelait il n’y a pas si longtemps son « arrière-cour », les peuples sont en train de réécrire leur propre histoire, déformée et dénaturée par des siècles de domination, ponctués de génocides, de massacres, de pillage et de négation des cultures autochtones.

Il n’y a aucune fatalité que l’Afrique reste le seul continent dominé et humilié. Il ne dépend que de ses enfants, hommes et femmes, pour consentir les sacrifices nécessaires pour libérer leur continent et préserver son indépendance et sa souveraineté.


* Demba Moussa Dembélé est économiste, chercheur

 

 

   

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Source : Pambazuka News
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