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La Paix Maintenant
Le Golan : voir Sharm
el-Sheikh
Danny Yatom et Moshe Amirav*
[le
gouvernement Olmert se conduit avec la Syrie comme le gouvernement
Golda le faisait avec l'Egypte avant la guerre de 73. On a vu le résultat.
Ces 2 députés importants (travailliste et Kadima) enjoignent
Olmert de répondre aux ouvertures syriennes]
http://www.haaretz.com/hasen/spages/770552.html
Ha'aretz, 5 octobre 2006
Trad. : Gérard pour La Paix Maintenant
Dans un ouvrage passionnant, " The March of Folly,
l'historienne Barbara Tuchman examine les énormes erreurs
commises par des dirigeants israéliens trop sûrs d'eux-mêmes et
psychorigides. Dans cette période propice aux examens de
conscience, y réfléchir est un exercice salutaire, qui ne passe
pas forcément par un examen de la deuxième guerre du Liban, mais
plutôt par celui d'un événement plus lointain : la guerre du
Kippour de 1973.
Un examen du comportement imbécile du gouvernement de Golda Meir
un gouvernement qui a refusé d'entamer des négociations avec
le président égyptien Anouar Sadate un an avant la guerre -
se justifie aujourd'hui par la proposition de la Syrie d'entamer
des pourparlers de paix. Cette ouverture a été rejetée par le
premier ministre Ehoud Olmert, comme par Ariel Sharon avant lui.
La rigidité d'esprit du gouvernement Golda découlait d'une
confiance en soi exagérée, et de l'idée que la profondeur stratégique
qu'offrait la péninsule du Sinaï était préférable à la paix.
Sadate avait approché Israël en 1972 (là aussi, par l'intermédiaire
de la presse étrangère : un journal autrichien) et avait dit :
"Nous sommes prêts à faire la paix avec Israël. Si Israël
repousse notre offre, je mobiliserai un million de soldats et je
ferai la guerre."
Golda dédaigna les termes de Sadate avec le mépris qui la caractérisait
: "Ils ne sont même pas capables de traverser le Canal (de
Suez)."
Et Moshe Dayan, le ministre de la défense d'alors, expliqua
l'importance stratégique du Sinaï dans sa célèbre déclaration
: "Mieux vaut Sharm el-Sheikh sans la paix que la paix sans
Sharm el-Sheikh."
Golda Meir et Moshe Dayan commirent une erreur historique en ne
testant pas la volonté de paix des Egyptiens. Fidèle à sa
promesse, Sadate partit en guerre un an plus tard. La conception
Golda-Dayan s'était écroulée, et 2.700 soldats israéliens payèrent
de leur vie cette arrogance et cette stupidité.
Il aura fallu un premier ministre courageux comme Menahem Begin
pour renoncer au Sinaï en échange de la paix et de la sécurité
sur le front égyptien. La paix avec l'Egypte est l'un des héritages
stratégiques les plus importants que nous ait laissés Begin. Récemment,
le président Bachar Assad a réitéré son offre d'entamer des négociations
de paix avec Israël. La réaction d'Olmert a été la même que
celle que Golda donna à Sadate. La seule différence, c'est que
Sharm el-Sheikh a remplacé le plateau du Golan.
Qu'est censé penser le président syrien quand il entend Olmert déclarer
que le Golan "restera dans les mains d'Israël pour
toujours"? Peut-être sera-t-il tenté de suivre la
voie de Sadate et de lancer une campagne militaire limitée qui
nous coûterait très cher.
Les dirigeants nous expliquent leur inflexibilité par le slogan :
"La Syrie n'a pas changé". Ce jugement fait peu de cas
d'importants développements, le plus important étant la décision
de la Ligue arabe (adoptée par la Syrie à Beyrouth) de soutenir
une paix pleine et entière avec Israël et la normalisation des
relations en échange des territoires conquis [en 1967].
Autre nouveauté : le souhait formulé par la Syrie d'entamer des
pourparlers sans conditions préalables. Jusqu'à présent, c'était
Israël qui le demandait à ses voisins. Mais maintenant que la
Syrie est d'accord, c'est Israël qui pose des conditions préalables.
Il suffit d'écouter les rationalisations du gouvernement Olmert
pour se rendre compte de la rigidité de sa pensée. L'une
consiste en "la solidarité entre amis" : les Etats-Unis
ne parlent pas à la Syrie, donc nous non plus. Mais les
Etats-Unis ne parlent pas à la Syrie parce que nous ne parlons
pas à la Syrie, et inversement.
Deuxième rationalisation : la Syrie est militairement faible et
isolée sur le plan diplomatique, alors pourquoi lui donner une légitimité?
En fait, c'est précisément parce que la Syrie est faible qu'il
est temps de faire la paix avec elle.
Il est vrai que le Golan constitue un atout stratégique, et qu'y
renoncer n'est pas sans risque, mais avoir le courage de reprendre
les négociations avec la Syrie présente aussi des avantages
stratégiques potentiels : éviter une guerre avec la Syrie, éliminer
le Hezbollah, mettre un terme au soutien syrien aux organisations
terroristes, isoler l'Iran, stabiliser le cessez-le-feu au Liban,
renforcer la position stratégique d'Israël au Moyen-Orient, et
permettre de consacrer nos ressources à nos besoins intérieurs.
Un processus de paix avec la Syrie entraînerait le Liban,
l'Arabie saoudite, les Palestiniens et d'autres pays arabes et
musulmans dans une nouvelle dynamique de réconciliation avec Israël.
L'analyse de ces opportunités, mises en regard des risques,
justifie la reprise des négociations avec la Syrie.
*Danny Yatom est général (réserve), ancien chef du Mossad et député
travailliste (proche d'Ehoud Barak).
Le Dr Moshe Amirav dirige le département de politiques publiques
à l'institut "Beit Berl". Il est député du parti
Kadima. |