Site d'information sur la Palestine, le Moyen-Orient et l'Amérique latine

 

Palestine - Solidarité

 

Retour :  Accueil  Sommaire A. Gresh  -  Bush au P.-O.  -  Originaux  Analyses  -  Mises à jour


Carnets du diplo

Bush et la Palestine, illusions et réalités
Alain Gresh

10 janvier 2008

La paix sera-t-elle signée avant la fin de l’année 2008 ? Un Etat palestinien verra-t-il le jour dans les mois qui viennent ? Ces questions, posées le plus sérieusement du monde à l’occasion de la visite du président George W. Bush en Israël et dans les territoires palestiniens, feraient presque douter de la santé mentale de certains commentateurs et responsables politiques. Peut-être parce que nous aspirons tous à la paix, que nous aimerions tant voir résoudre l’interminable conflit israélo-palestinien, nous nous accrochons à n’importe quelle déclaration ou rencontre pour se dire : cette fois-ci sera la bonne.

Pourtant, nous ne pouvons nous cacher dans le ciel abstrait des idées. Il faut redescendre sur terre, où prennent le dessus les réalités de la vie qui sont nettement moins plaisantes, en premier lieu pour les Palestiniens.

Leur vie quotidienne est marquée par trois réalités : la colonisation, les checkpoints et la prison. A-t-on assisté, depuis la reprise du dialogue entre Israël et les Palestiniens, à la moindre avancée sur un de ces dossiers ? Non, au contraire.

Sur les colonies. Quelques chiffres parlants. Selon un tableau publié par Report on Israeli Settlement in the occupied territories (Vol. 17, n° 6) de novembre-décembre 200, la population des colonies de Cisordanie a augmenté, chaque année, entre 5% et 8% (alors même que la population israélienne n’augmentait que de 1,8 à 2,6%). Et pour ceux qui croient que le mur de séparation prépare un retrait des colonies situées à l’est de cette ligne, le même bulletin montre que le taux de croissance de la population des colonies est le même que l’on se situe à l’est ou à l’ouest du mur. Alors que cette colonisation rend de plus en plus improbable la possibilité de création d’un Etat palestinien, les Etats-Unis (et aussi la France) se bornent à quelques déclarations sans jamais prendre la moindre mesure concrète, sans jamais exercer la moindre pression réelle sur le gouvernement israélien.

Quant aux colonies dites illégales (c’est-à-dire celles qui sont construites sans l’aval explicite du gouvernement israélien), Ehoud Olmert annonce, à chaque visite d’un haut responsable américain, qu’il va les démanteler. Cela n’engage à rien, puisqu’il ne tient pas ses promesses et que chacun le sait.

L’éditorial de Haaretz du 9 janvier, « Bush, accessory after the facts », notait :

« L’avant-poste [terme qui désigne des colonies illégales] de Migron, qui a été créé sur des terres privées palestiniennes, et dont les Etats-Unis ont demandé le démantèlement avec une fausse détermination, est déjà un fait établi. Il existe depuis 7 ans, avec des jardins bien tenus, un crèche, un jardin d’enfants, des infrastructures qui ont été financées par l’Etat à hauteur de 4 millions de shekels et des habitants qui ne se considèrent pas comme des "jeunes des collines" [càd. des pionniers], mais comme des habitants ordinaires qui travaillent à Jérusalem pour gagner leur vie et reviennent tous les soirs chez eux et ne peuvent même pas imaginer que quelqu’un puisse oser les expulser un jour. »

Et, poursuit l’éditorial, ce n’est qu’un exemple : de nombreux autres avant-postes ont une population de plus de 500 habitants.

Selon l’article de Patrick Saint-Paul, correspondant du Figaro, (« Bush réclame timidement à Israël un gel de la colonisation », 10 janvier) (il ne semble pas que le texte soit repris sur le site du quotidien), « interrogé sur les colonies sauvages de Cisjordanie, qu’Israël s’était engagé à démanteler auprès des Etats-Unis en 2003 [vous avez bien lu, 2003], sans jamais passer à l’acte, Bush a lâché un rire gêné. "Les avant-postes doivent disparaître" ». Fin du chapitre...

Sur les checkpoints, je rappelle ce que j’écrivais dans Annapolis, village Potemkine de la paix. « Rappelons que même le démantèlement de certains checkpoints en Cisjordanie, qui transforment chaque déplacement des Palestiniens en cauchemar et qui pourtant a aussi mille fois été promis, ne s’est jamais effectué. Un rapport des Nations unies révélait que le nombre de barrages (roadblocks) avait atteint 572, une augmentation de 52% par rapport aux 376 barrages qui existaient en août 2005. » La visite du président Bush s’est d’ailleurs traduite par le bouclage de la Cisjordanie pour trois jours ! Comme le raconte un habitant de Ramallah (selon le quotidien Haaretz du 10 janvier, « Ramallah prepares for Bush’s visit », Avi Issacharoff), « on nous a demandé de ne pas sortir sur les balcons et sur les toits. Nous ne pouvons même pas aller dans la rue. George Bush, ce criminel, nous a imposé un couvre-feu. Comme si ce n’était pas assez avec les Israéliens. Maintenant, nous l’avons lui aussi. Il est en train de détruire le monde... »

Sur le climat à Ramallah, on pourra lire « A Ramallah, cortège de voitures blindées dans une ville en état de siège » (Benjamin Barthe, Le Monde, 10 janvier).

Je n’évoque même pas le blocus de Gaza, la restriction de livraison d’électricité, qui fait de ce petit territoire une prison à ciel ouvert dont les geôliers diminueraient chaque jour les rations... Il ne manque ni rapports d’organisations internationales ni témoignages sur ces faits, mais la soi-disant communauté internationale détourne pudiquement les yeux.

Sur les prisonniers (au nombre de 10 000) et le fonctionnement de la justice militaire israélienne, Michel Bôle-Richard publie dans Le Monde un article intitulé : « La justice militaire israélienne accusée de bafouer les droits des Palestiniens ».

« Depuis l’occupation de la Cisjordanie par Israël en 1967, les tribunaux militaires ont jugé plus de 150 000 Palestiniens en ignorant, la plupart du temps, les règles élémentaires de justice et des droits de l’homme, selon le rapport publié, dimanche 6 janvier, par l’organisation Yesh Din, intitulé "Poursuites d’arrière-cour". Pendant plus d’un an, des membres de cette ONG ont assisté à plus de 800 audiences. Ils ont dressé un bilan atterrant de la justice militaire dans les territoires occupés. »

« Selon les chiffres fournis par les autorités militaires, sur 9 123 cas examinés en 2006, seules 23 personnes déférées ont été reconnues innocentes, laissant planer le doute sur le respect du principe de la présomption d’innocence et sur les conditions d’examen des dossiers. Partant de 118 procédures, Yesh Din a établi que la décision de maintien en détention était acquise en moyenne au bout de 3,4 minutes et que la reconduction de l’emprisonnement était en moyenne expédiée en 1,54 minute. "Il faut en général deux minutes pour envoyer quelqu’un en prison avant que la procédure d’enquêté soit terminée", indique le rapport. »

Emily Schaeffer, une citoyenne ayant la double nationalité israélienne et américaine, et servant de conseillère légale à l’organisation Yesh Din, publie, dans l’International Herald Tribune du 7 janvier, une tribune intitulée : « Surprising lessons from Israel »

Elle écrit : « Israël a mis en place ses cours militaires pour se réveiller, quarante après et quelques milliards de dollars en plus dépensés, avec environ 10 000 détenus qui passent devant ces cours tous les ans. Ces cours (...) ont seulement servi à amplifier le ressentiment parmi les Palestiniens qui vivent sous occupation et parmi bien des nations musulmanes et arabes et elles ont miné les chances de changements positifs dans la société palestinienne. »



Source : Carnets du diplo
http://blog.mondediplo.net/...


Avertissement
Palestine - Solidarité a pour vocation la diffusion d'informations relatives aux événements du Moyen-Orient et de l'Amérique latine.
L' auteur du site travaille à la plus grande objectivité et au respect des opinions de chacun, soucieux de corriger les erreurs qui lui seraient signalées.
Les opinions exprimées dans les articles n'engagent que la responsabilité de leur auteur et/ou de leur traducteur. En aucun cas Palestine - Solidarité ne saurait être tenue responsable des propos tenus dans les analyses, témoignages et messages postés par des tierces personnes.
D'autre part, beaucoup d'informations émanant de sources externes, ou faisant lien vers des sites dont elle n'a pas la gestion, Palestine - Solidarité n'assume aucunement la responsabilité quant à l'information contenue dans ces sites.
Pour contacter le webmaster, cliquez < ici >

Retour  -  Accueil Ressources  -  Analyses  -  Communiques  -  Originaux