Opinion
L'IDE Renault et
les règles du marché
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Jeudi 27 septembre
2012
Renault
veut que l'Algérie contrevienne aux
sacro-saintes règles du marché, les
mêmes qui lui permettent, aujourd'hui,
d'investir dans le pays qui,
hermétiquement fermé, a payé le prix
fort en matière de destruction de son
tissu industriel et d'abandon de son
économie au bon vouloir de la prédation
privée. Les mêmes règles qui interdisent
à l'Etat algérien de se mêler
d'investissements économiques pour se
faire bien voir et persister dans son
statut de bon élève du Fonds monétaire
international (FMI) et des institutions
financières internationales. La Régie,
qui a fait languir, comme d'autres, les
partisans de l'ouverture et de la
libre-entreprise, fait toujours la fine
bouche. Elle trouve toujours à redire
quant à la décision d'implanter son
usine. Sa dernière trouvaille est la
condition léonine d'interdire, cinq ans
durant, à tout autre constructeur
automobile (allemand en l'occurrence) de
fabriquer des véhicules sur le sol
algérien. L'instauration d'une sorte de
monopole en quelque sorte. Cette
attitude est tenue, alors que la France
aurait beaucoup reculé en Algérie en
termes de parts de marché. Sans
préjudice de ce recul en Afrique, au
profit des Etats-Unis, de la Chine et de
la Russie. Une attitude que ne pourrait
expliquer que l'assurance d'être en
position de force ou l'escompte d'une
certaine allégeance des autorités
algériennes. Et ce ne serait pas tout.
Laurent Fabius, le ministre français des
Affaires étrangères qui, malgré son
acharnement à intriguer contre la Syrie,
avait trouvé, en juillet, le temps
d'intervenir pour exiger que la
production algérienne de Renault ne
constitue pas «une menace pour la
France». Il veut du «gagnant-gagnant».
Comprendre que tout doit se vendre
localement, comprendre qu'il n'est pas
question de construire des voitures
susceptibles d'être concurrentielles sur
le marché mondial, comprendre que
l'Algérie doit renoncer à toute idée de
les exporter, comprendre qu'elle doit se
contenter d'avoir enfin un IDE visible.
Tant pis si Renault aura «négocié au
mieux de ses intérêts». Venue à Alger
préparer la visite prochaine de François
Hollande, la ministre française du
Commerce, Nicole Bricq, a dit :
«L'Algérie a la particularité d'être à
la fois un marché et un lieu
d'investissement.» Elle ne nous apprend
rien d'extraordinaire. Ensuite, elle
ajoute : «Avec les puissances émergentes
intermédiaires comme l'Algérie, nous
devons, les uns et les autres, être
soucieux des emplois que nous créons
dans nos pays respectifs.» Là, on a un
élément d'information qui confirme le
souci de l'Etat français de ne rien
laisser faire qui compromettrait ses
«équilibres» économiques. Le marché et
sa main invisible peuvent passer, ils ne
comptent plus. Au plan de la division
internationale du travail, il faut
toujours veiller à maintenir la
domination du centre sur la périphérie.
C'est à ce prix que les pays dominés
seront admis dans l'arène en supplétifs.
A eux, toutes les contraintes du
néolibéralisme et de ses effets
dévastateurs, aux puissances
industrielles, toutes les latitudes
qu'offrent les «dérogations» pour se
protéger.
Article publié sur
Les Débats
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