Opinion
Corruption : le
rouage Chakib Khelil
Ahmed Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Jeudi 15 août 2013
Expression
des réformes, chevalier des
restructurations qui ont touché le
secteur de l'énergie, M. Chakib Khelil
figurait à merveille le profil qu'il
fallait pour l'épopée libéralisatrice de
l'économie algérienne. Il était allé à
la bonne école, Banque mondiale, Shell
et Philips Petroleum aux Etats-Unis dont
il est citoyen. L'homme ne pouvait mieux
cadrer avec ses missions et mieux
correspondre au vent qui soufflait dans
le monde et sur le pays. Mais voilà que
l'on s'aperçoit que, à côté de son
boulot de démantèlement des entreprises
publiques et de mise en place d'une
législation dévastatrice pour la
souveraineté sur les richesses
nationales, il se faisait grassement
payer en retour auprès de certaines
sociétés contractantes dans le secteur
qu'il dirigeait, prêtes à lui lâcher des
miettes en échange de passe-droits. Ce
fait est-il si extraordinaire qu'il y
paraît ? La jungle du marché mondial
serait-elle indemne de telles pratiques
? L'organisation de coopération et de
développement économiques (OCDE)
aurait-elle réellement le souci de
veiller au respect des " règles de la
concurrence " ? Quand on sait la
férocité de la course au profit.
Ecoutons à ce propos ce qu'a dit
Jean-Pierre BUEB, conseiller au Service
Central de Prévention de la Corruption,
en France, au forum mondial de l'OCDE
sur la gouvernance : " Depuis
quelques années, en effet, des facteurs,
apparemment indépendants, sont venus
faciliter les manœuvres frauduleuses
d'individus (…) prêts (…) à renier des
principes qui prévalaient encore il y a
une trentaine d'années dans l'ensemble
de la classe politique ". L'auteur,
comme nous pouvons le constater, semble
d'abord s'étonner des faits mais, dans
sa quête de leur compréhension, il fait
vite de trouver l'explication et nous la
livre : " cette extension du phénomène
peut être expliquée, en grande partie,
par la crise économique latente qui, en
frappant l'Union Européenne, (…)
contraint les entreprises, pour
survivre, à décrocher des contrats à
tout prix et ce, parfois, quel que soit
le moyen utilisé pour y parvenir ". Nous
nous situons d'emblée dans une approche
systémique de la corruption, dont notre
ex-ministre de l'énergie et des mines
n'est qu'un élément parmi d'autres. Le
rouage d'un mécanisme d'ensemble qui
obéit à sa propre logique. En plus
clair, M.Khelil n'a pu faire ce qu'il a
fait que lorsque toutes les conditions
de motivation et de passage à l'acte
étaient réunies. Une question s'impose
en la circonstance : ne faut-il juger
que la personne en laissant ouvertes les
options qui reproduiront, de toute
évidence, d'autres mêmes cas de figure ?
Alors même que nous savons l'aveu
d'échec des " experts " en la matière,
qui trônent dans les instances
dirigeantes de la finance internationale
et du commerce mondial, qui font appel
en dernière instance à la probité et à
la morale des gestionnaires et ne
croient pas beaucoup aux législations
moult fois " améliorées ". Toutes les
raisons de revoir les bases
poltico-économiques de la maison
Algérie. A commencer par un retour sur
ces " ajustements " plus propices à la
prédation qu'au développement du pays.
Article publié sur
Les Débats
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