Infirmier dans un hôpital public
parisien, Pierre a contracté le Covid-19.
Guéri, il reprend le travail et partage
son expérience au micro de Sputnik.
Entre les difficultés dues à cette crise
sanitaire inédite et celles que
dénonçaient depuis des mois les
syndicats des soignants, son témoignage
est émouvant et sans concession.
Pierre fait partie
du «personnel soignant en première
ligne»: il est infirmier depuis deux ans
au service de suppléance de l’hôpital
Lariboisière, à Paris. Chargé de venir
en renfort dans les services en manque
de personnel (en dehors de la
réanimation), il a une vision
transversale unique de cet établissement
public. Guéri du Covid-19, le jeune
homme s’apprête à reprendre le travail
et partage avec Sputnik, à visage
découvert malgré les risques encourus,
sa vision des choses.
Au cours de sa
carrière, Pierre a travaillé au sein des
urgences de l’hôpital Lariboisière, avec
«ses 250 à 300 personnes accueillies
par jour» et a vu le service «systématiquement
saturé».
Cette crise suit
«une longue crise due aux réductions
budgétaires»
Le jeune infirmier
ne cache pas que dans les services
d’urgence, le personnel a du mal à avoir
des vacances et que l’«on demande
toujours aux personnels de faire des
heures supplémentaires». Ses aveux
ne font que confirmer que
l’hôpital public est en difficulté
et en tension depuis des années, tous
comme les services de gériatrie et les
Ehpad.
«Malheureusement,
on a l’habitude des difficultés,»
souligne l’infirmier.
Néanmoins, on ne
peut pas indéfiniment tirer sur la
corde. «Cette crise sanitaire, brutale,
avec un agent infectieux virulent qui
touche beaucoup de monde, arrive au
moment où le personnel hospitalier est
essoufflé, où les structures ne sont pas
forcément adéquates ou formées, par
manque de moyens humains ou techniques»,
déplore Pierre. Il témoigne que suite «à
la mécanique de gestion mise en place
par différents gouvernements», suite à
la «longue crise due aux réductions
budgétaires, qui ont mis un gros coup à
l’hôpital public», beaucoup
d’infirmiers, de médecins et
d’aides-soignants l’ont quitté.
«On se retrouve
avec un hôpital public qui est déjà en
difficulté au moment où arrive une
difficulté majeure», martèle le jeune
infirmier.
Néanmoins, Pierre,
qui voit «la relation humaine comme
la base du métier», ne quitte le «front»,
pour reprendre
la métaphore martiale d’Emmanuel Macron,
que parce qu’il se retrouve lui-même
contaminé par le coronavirus.
«Après la crise,
on espère être encouragés pour des
combats équitables»
Au début de
l’épidémie, les personnels de
Lariboisière se sont très vite rendu
compte que «les nouveaux patients
avaient besoin d’assistance respiratoire».
En conséquence, «les principes de
précaution face aux agents infectieux»
ont étés renforcés dans son
établissement. Mais puisque les
directives changeaient face à ce virus
mal connu, «très vite, des services
dédiés aux patients Covid ont étés
organisés [dans le cadre de la
restructuration d’urgence de l’hôpital,
ndlr]: actuellement, c’est un immeuble
entier.»
«Personnellement,
je n’ai pas eu de problème avec le
matériel de protection dans les
différents services où je suis passé. Il
a été donné au compte-gouttes, mais
donné quand même», assure Pierre.
Malgré toutes les
précautions, certains soignants n’ont
pas échappé à la contamination, que ce
soit «dans le milieu hospitalier,
quand on n’a pas de temps de se préparer
face à une intervention d’urgence»
ou en dehors du cadre du travail. Sans
savoir précisément à quel moment il a
été contaminé, Pierre, après être passé
par «une grosse fatigue et une perte
de l’odorat» reprendra le travail
bientôt.
«On aurait bien
voulu être applaudi quand on a manifesté
il y a six mois, un an, sourit Pierre.
On est content de faire ce travail pour
lequel on a été formés, mais la
population devrait se rendre compte que
l’on est beaucoup plus importants que
certaines choses de la société
actuelle.»
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