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Archevêque d'Alep: "Si l'Occident veut
nous aider,
qu'il nous aide à rester chez-nous"
Sputnik
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Mercredi 10 février 2016
Source:
Sputnik
En 2015, le Vieux
Continent s'est retrouvé confronté à un
défi inattendu: près d'un million de
réfugiés sont entrés en Europe, un
record depuis l'époque de la Seconde
Guerre mondiale. Et pendant que les
pouvoirs européens peinent à trouver une
solution, la voix d'un évêque s'élève à
Alep. Son message est simple:
aidez-nous... à rester en Syrie.
Ces dernières
semaines, la ville syrienne d'Alep est
de nouveau en tête des bulletins
d'informations: tandis que les autorités
syriennes, dont les troupes poursuivent
leur progression dans le nord,
définissent la prise du contrôle de
cette ville comme leur priorité
stratégique, l'Occident dénonce les
victimes civiles et la Turquie voisine
enregistre un nouvel afflux de réfugiés.
La voix des habitants de la ville, de
ceux qui vivent la guerre depuis près de
quatre ans au jour le jour se perd
derrière tous ces enjeux. A quoi
aspirent-ils? Retrouver la paix et
rester dans leur pays, confie
Monseigneur Jeanbart, archevêque d'Alep,
dans un entretien accordé à Sputnik.
"Si
l'Occident veut nous aider, si quelqu'un
veut nous aider, qu'il nous aide à
rester chez-nous, qu'il pousse vers la
paix, vers une solution à cette crise",
a indiqué l'archevêque.
D'ailleurs, aider
les gens sur le terrain, prévenir les
nouvelles vagues de réfugiés coûterait à
l'Occident, "1.000 fois moins chers",
estime-t-il. Et de rappeler que
l'Allemagne avait octroyé cinq milliards
d'euros à la Turquie pour que cette
dernière s'occupe des réfugiés syriens.
Et pourtant, selon l'homme d'Eglise, un
à deux milliards pourraient suffire à
aider les Syriens de toutes les
confessions à rester au pays.
Mais c'est surtout
la bonne volonté d'arrêter les combats
qui aurait suffi pour venir en aide aux
Syriens, juge-t-il. "Avec très peu
d'argent et un peu de bonne volonté pour
arrêter les batailles, empêcher ceux qui
envoient des mercenaires de les
financer, les choses iraient bien et il
n'y aurait pas besoin d'envoyer des
milliards pour s'occuper des réfugiés",
indique-t-il.
Excédés par des années de guerre et
incapables de gérer la crise par
eux-mêmes, les Syriens placent tout leur
espoir dans le succès des négociations
internationales, tout en réalisant que
le chemin menant à l'entente sera
épineux. Mais leur reste-t-il un autre
espoir?
"J'attends
beaucoup et je souhaite qu'elles (les
négociations, ndlr) réussissent, même
s'il y a eu quelques difficultés en
chemin", confie Mgr. Jeanbart, avant de
rajouter: "Tout le monde a besoin de la
paix: que ce soit le gouvernement, que
ce soit l'opposition, et surtout les
citoyens. Ce sont les pauvres citoyens
qui paient, c'est nous qui payons les
frais de ces batailles".
En attendant, il
vit dans l'espoir qu'un jour son pays,
que les Syriens aiment comparer à une
"mosaïque de confessions et d'ethnies",
renaisse des cendres pour redevenir la
terre de la paix, de la multiculture et
de la tolérance. "Je demande au Seigneur
de faire en sorte que cette guerre
finisse le plus tôt possible, qu'il y
ait un dialogue et que l'on retrouve la
Syrie que nous avons toujours connue:
une Syrie où vivent ensemble chrétiens,
musulmans, druzes, alaouites, où nous
vivons en frères", rêve aujourd'hui
l'archevêque d'Alep.
Regardant au-delà
de la pensée binaire, l'archevêque tente
de trouver un signe, un sens profond
dans l'épreuve à laquelle sont
confrontés son peuple et son pays. Ne
serait-ce qu'"une rencontre œcuménique,
historique, tant attendue entre l'Eglise
de Russie et l'Eglise Catholique",
s'interroge-t-il, se référant à
l'entrevue entre le Pape François et le
patriarche Cyrille prévue le 12 février
à Cuba.
"J'ai
beaucoup d'espoir, un grand espoir, que
j'attends de la rencontre du St-Père
François Ier et du Patriarche Cyrille,
je crois que cela va beaucoup aider à
pousser vers une solution. Cela va
pousser l'Occident, la Russie, la Syrie
et tout le monde à faire un supplément
d'efforts pour réaliser la paix", a
conclu Mgr. Jeanbart.
Resté à l'abri des
troubles au cours des premiers mois
suivant le début de la crise, Alep
semblait être un des rares havres de
stabilité en Syrie. Des tensions
éclataient çà et là, mais rien ne se
passait à Alep. La donne a changé en
2012: premiers attentats-suicides,
premières manifestations, et voilà qu'à
l'été 2012 la deuxième ville du pays
figurait dans tous les bulletins
d'informations comme le "Benghazi
syrien" (en référence au fief de
l'opposition libyenne). Quatre années de
combats et de destruction ont suivi.
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