Actualité
L'horizontalité en action : les Gilets
jaunes ont tenu
leur quatrième Assemblée
des Assemblées
RT

La séance plénière
de l'ADA des Gilets jaunes à
Montpellier, le 1er novembre.
©
Twitter : @frederic_rtfr
Dimanche 3 novembre 2019
Source :
RT Né d'un rejet
viscéral de la représentation, le
mouvement des Gilets jaunes, après un an
d'existence, réfléchit à comment avancer
tout en respectant sa volonté absolue
d'horizontalité. Plongée au cœur de leur
Assemblée des Assemblées à Montpellier.
A l'approche de
leur premier anniversaire, les Gilets
jaunes ont tenu à Montpellier leur
quatrième Assemblée des Assemblées (ADA)
du 1er au 3 novembre. Une manière de
mettre en pratique de façon très
concrète le concept d'horizontalité qui
constitue l'ADN du mouvement : mandatés
par leurs compagnons des ronds-points,
ils sont près de 500 à être venus des
quatre coins du pays pour échanger sur
diverses thématiques et mettre en commun
leurs réflexions, dans l'optique de
faire avancer le mouvement par leur
intelligence collective.

Au défi
méthodologique de taille que représente
l'organisation des débats se sont, en
outre, ajoutés les quelques bâtons dans
les roues mis par les autorités. Aucune
des collectivités contactées n'ont, en
effet, répondu aux demandes des
organisateurs de leur allouer une salle
pour l'événement. Loin de se laisser
abattre, ceux-ci ont décidé d'occuper un
ancien musée agricole laissé à l'abandon
en 2010. Entre ce cadre aux allures de
squat postmoderne (de nombreux vestiges
du musée se situant dans un bâtiment
défraîchi, tagué de toutes parts), et
une occupation jugée illégale par la
préfecture, l'image d'un mouvement
capable de fonctionner en parallèle d'un
système qu'il combat ne s'en trouve que
renforcée.
Reste que les
autorités avaient fait savoir qu'elles
entendaient «mettre fin à cette
occupation en respectant les procédures
légale», ce qui, dans les faits, a
permis à l'événement de se tenir sans
encombre. C'est un petit monde en
autogestion totale qui s'est alors mis
en œuvre le temps d'un week-end : de la
cantine, avec uniquement des produits
locaux et bio, au coin buvette, en
passant par la sécurité et la mise en
place de l'imposante sono... Des
bénévoles se sont chargés de faire
tourner la machine pour que les échanges
d'idées se passent dans les meilleures
conditions. En somme, les Gilets jaunes
ont reproduit à plus grande échelle ce
qu'ils façonnent sur les ronds-points
depuis bientôt un an.
Appel à rejoindre
la grève du 5 décembre
C'est dans ces
conditions et dans une ambiance
résolument studieuse que les discussions
se sont tenues trois jours durant. Sur
la forme, des petits groupes d'une
dizaine de personnes ont échangé sur
l'une des sept thématiques, définie en
amont afin de pouvoir préparer le sujet.
Chaque groupe a ensuite écrit une
synthèse de ses réflexions, qui a
finalement été partagée en assemblée
générale. Conscients que, par essence,
le mouvement est traversé par des
courants très divers, il n'était pas
question de faire émerger des réponses
communes. L'objectif était plutôt de
lister les points d'accords autant que
de désaccords, pour donner une
photographie à l'instant de T de l'état
d'esprit du mouvement.
Cependant, dans le
cadre de leur thématique «Comment
travailler avec les autres mouvements
?», les Gilets jaunes ont tout de même
voté une proposition pour rejoindre la
grève du 5 décembre contre la réforme
des retraites. L'appel à s'associer à
cette grève a été adopté à une écrasante
majorité lors d'un vote à main levée, en
séance plénière. «L'heure est à la
convergence avec le monde du travail et
son maillage de milliers de
syndicalistes qui, comme nous,
n'acceptent pas», ont-ils également
précisé dans un communiqué de presse.
Parmi les autres
thèmes, on retrouve des pistes de
réflexion qui touchent à d'autres sujets
d'actualité, comme les actions
envisagées pour le premier anniversaire
du mouvement le 17 novembre prochain, ou
encore l'attitude à adopter dans le
contexte des municipales, qui se
tiendront en mars 2020. A noter que ce
point fut source de nombreux désaccords,
notamment sur la pertinence ou non de
présenter des listes. Certains
participants estimaient en effet
essentiel de s'implanter dans le paysage
politique local – d'autant qu'il revient
aux maires d'élire les sénateurs – quand
d'autres ne souhaitaient pas rentrer
dans le jeu politique, et subir ainsi
les affres de la représentation. Comme
toujours, il a été souligné qu'in fine
le choix revenait aux groupes locaux,
les mieux à mêmes d'analyser la
situation sur place et qui demeurent de
toutes façons totalement souverains dans
leur décision.
Une relation
toujours difficile avec les médias
Un consensus s'est
en revanche dégagé sur le thème des
«alliés et des ennemis». Les médias,
avec qui le mouvement entretient une
relation conflictuelle depuis ses
débuts, ne sont toujours pas en odeur de
sainteté auprès des Gilets jaunes. «Les
médias dominants sont à ranger avec
l'ennemi, étant dans l'ensemble des
organes de propagande de l'ennemi»,
ont-ils expliqué dans leur synthèse
présentée lors de l'assemblée générale.
Malgré tout, le
sentiment est, par nécessité, quelque
peu ambivalent : déplorant d'être «invisibilisés»,
les Gilets jaunes avaient en effet
convié la presse à cette ADA, une
première en quatre éditions. Tenus à
l'écart des travaux de groupe et après
avoir reçu des consignes claires sur les
endroits possibles de filmer, la
présence des journalistes de la presse
mainstream – et notamment de BFM
TV – s'est accompagnée d'une défiance
manifeste tout au long du week-end. Lors
de la présentation de la synthèse sur
les actions envisagées pour le 17
novembre, l'assemblée a, comme un seul
homme, intimé au Gilet jaune qui avait
pris la parole de se taire, jugeant
qu'il n'était pas souhaitable de faire
part de leurs plans en présence des
médias.
Le RIC, absent
des débats et pourtant omniprésent
Sujet emblématique
qui rassemble au sein du mouvement, le
référendum d'initiative citoyenne en
toutes matières ne figurait, quant à
lui, pas parmi les thèmes débattus.
Impossible pourtant de ne pas être
confronté à cette idée, discutée par
tous et mise en avant sur des pancartes,
des affiches ou encore des banderoles
aux quatre coins du bâtiment.
Les Gilets jaunes
se sont tellement appropriés le concept,
que certains, à l'image d'un groupe de
l'Aveyron, ont décidé de le mettre
eux-mêmes en application au niveau
local. Après un travail d'information de
longue haleine dans leur commune de
Saint-Affrique, ils ont convaincu les
habitants de s'approprier le sujet, et
voteront le 23 novembre pour accepter ou
décliner les trois propositions qui ont
émergé, à savoir l'utilisation de
produits locaux et bio dans les cuisines
collectives, l'interdiction du
glyphosate sur la commune et...
l'intégration du RIC dans les prises de
décision de la commune.
Selon les Gilets
jaunes qui l'ont mis en place, ce projet
expérimental a reçu un accueil plutôt
favorable de la mairie et ils espèrent
que s'il fait mouche au niveau local, il
commencera à essaimer, pour finir par
s'imposer comme une évidence au niveau
national.
Lire aussi :
Troisième Assemblée des Assemblées: les
Gilets jaunes veulent multiplier les
initiatives municipales
RT
France, SAS. 2005–2019. Tous droits réservés.
Publié le 4 novembre 2019
Le dossier politique
Les dernières mises à jour

|