Actualité
Contre les actes antisémites,
contre leur instrumentalisation,
pour le combat contre toutes les formes
de racisme
Les Invités De Mediapart
Lundi 18 février 2019
Nous soussignés associations, partis,
syndicats, indépendants, sommes toutes
et tous activement impliqués dans la
lutte contre le racisme sous toutes ses
formes. La lutte contre l'antisémitisme
fait partie à part entière de notre
combat antiraciste. Nous condamnons
fermement les actes antisémites, qui
surgissent dans un contexte social et
politique particuliers.
Malgré l'ampleur du
dispositif de répression policière et
judiciaire déployé contre les Gilets
jaunes par l'État, le mouvement continue
de bénéficier d'un fort soutien
populaire. Il n’est pas homogène et
révèle une effervescence sociale. Face à
un gouvernement déterminé à ne pas
répondre aux attentes sociales, il
reflète la société française et ses
contradictions et a largement évolué
dans ce qu’il porte depuis le mois de
novembre.
La séquence que
nous vivons est par conséquent confuse.
Si des éléments d'extrême-droite sont
encore présents, le mouvement montre
bien qu'ils sont loin d'être
hégémoniques et capables d'en prendre le
contrôle, en l'état actuel.
Politiquement, mais aussi physiquement,
les groupes d'extrême-droite sont mis à
l'écart, comme cela a pu être constaté à
Lyon, Paris, Toulouse ou encore
Bordeaux. Plus le mouvement perdure,
plus l'espace auquel l'extrême-droite
pouvait prétendre durant les premières
semaines semble se rétrécir.
Parallèlement, les contacts et
convergences avec des syndicats, des
collectifs antiracistes, de
sans-papiers, de soutien aux migrants se
renforcent.
Les tags
antisémites du week-end du 9 février
comme la dégradation du lieu de mémoire
d'Ilan Halimi s’inscrivent dans le
contexte de cette période de brouillage
politique et informatif. Une période qui
favorise la résurgence d’un racisme
identitaire rappelant celui de
l’entre-deux guerres. Ces actes
antisémites portent bien la signature
idéologique de l'extrême-droite
nostalgique du nazisme (croix gammés,
croix celtiques,« juden » etc.). Ils
témoignent de la progression de la
dialectique d'extrême droite à l'échelle
nationale et planétaire dans un contexte
d'aggravation des inégalités sociales.
Or le gouvernement et ses alliés ont
choisi d’instrumentaliser ces actes
contre les Gilets jaunes, dénonçant leur
supposée violence, antiparlementarisme
et antisémitisme.
Pourtant, c'est
bien ce gouvernement qui, récemment,
entreprenait de réhabiliter le maréchal
Pétain, chef du régime
collaborationniste de Vichy. C'est bien
cette même classe politique qui trouvait
si peu à redire des hommages rendus à
Maurras ou à Céline, écrivains
violemment antisémites. L'antisémitisme
est une affaire bien trop grave pour la
laisser à celles et ceux qui, jour après
jour, s'emploient à stigmatiser et à
réprimer les minorités. Le sommet du
cynisme est atteint lorsque, déjà, nous
pouvons percevoir le glissement
dangereux consistant à attribuer la
montée de l'antisémitisme au «
communautarisme musulman », comme n'a
pas manqué de s'y adonner un Eric Ciotti,
hélas pas isolé. Le racisme structurel
n'est ni le fait des Gilets jaunes, ni
le fait des minorités. Il est celui de
l'État qui organise une société
inégalitaire et violente.
Nous n’acceptons
pas la manipulation dégradante de la
lutte antiraciste par tous ceux qui, le
plus souvent, ont favorisé le racisme.
Nous luttons contre le racisme sous
toutes ses formes, nous n'oublions pas
non plus tous les actes racistes et
toutes les violences policières
islamophobes, négrophobes, homophobes,
visant les asiatiques, les personnes
LGBT. Ce que disent les chiffres depuis
des années tient en une phrase : le
racisme avance en France et en Europe.
Nous ne manifesterons pas ni ne
participerons à la grand-messe organisée
par les forces et partis politiques,
ceux qui se disent progressistes avec
ceux qui s'inscrivent contre le
mouvement social, et qui affirment
ensemble : « le racisme, ce n'est pas la
France. » Cet « antiracisme », vidé de
sens social et politique, est celui des
pompiers pyromanes. L'antiracisme que
nous revendiquons reconnaît la
responsabilité politique du gouvernement
français et des forces politiques
alliées qui défileront avec lui.
Manifester contre le racisme avec ceux
qui, LREM en tête, en sont responsables
et l’instrumentalisent relève pour nous
de la contradiction et de la faute
politique. Nous affirmons que cela ne
peut être que contre-productif.
Nous ne nous
laisserons pas prendre en otage entre
les instrumentalisations du gouvernement
ou celles des officines et ambassades
poursuivant un agenda n'ayant rien à
voir avec le combat contre le racisme et
l'antisémitisme. Notre refus de la haine
antisémite comme de toutes les haines
raciales nous l’exprimerons sur un
terrain dégagé de tout ce qui produit et
entretient ces haines. Le mouvement
anti-raciste ne servira pas
de caution pour salir les Gilets jaunes.
La période est dangereuse nous en sommes
conscients, et une sortie de crise qui
se contenterait de rétablir l’ordre,
serait porteuse de conversion à la haine
raciale et au fascisme. Les
mobilisations exigent des réponses
sociales et démocratiques. La
responsabilité gouvernementale est
totalement engagée.
Nous appelons à manifester contre les
actes antisémites, contre leur
instrumentalisation, contre le racisme
sous toutes ses formes :
Mardi 19 février à 19h
Place Ménilmontant Paris 75020
(M° Ménilmontant)
Premiers
signataires : UJFP, PIR, Collectif Rosa
Parks, ATMF, FTCR, Femmes plurielles,
Fondation Frantz Fanon, AFPS 63, AFPS
Paris 14-6, AFPS Paris Sud, Action
Antifasciste Paris-Banlieue, FUIQP,
Argenteuil Solidarité Palestine, Comité
Adama, CEDETIM/IPAM, AFD International,
Urgence notre police assassine (UNPA),
NPA, Le temps des lilas...
Personnalités :
Ivar Ekeland (mathématicien), Ahmed
Abbes (mathématicien), Sonia Dayan-Herzbrun
(sociologue), Stathis Kouvelakis
(philosophe), Julien Thery (historien),
Maryse Tripier (sociologue), Véronique
Bontemps (anthropologue), Gustave
Massiah (économiste), Catherine Samary
(économiste), Judith Bernard (metteure
en scène), Dominique Grange (artiste
chanteuse), Alain Gresh (journaliste),
François Gèze (éditeur), Barbara
Glowczewsky (anthropologue), Geneviève
Sellier (professeur emerite), Patrick
Simon (démographe), Nicolas Frize
(compositeur), Yves Chilliard
(biologiste), Michel Harris
(mathématicien), Taoufiq Tahani
(mathématicien, président d'honneur de
l'AFPS), Ugo Palheta (sociologue et
membre du NPA), Laurent Lévy
(essayiste), Saïd Bouamama (sociologue),
Kader Attia (écrivain), Isabelle
Cambourakis (éditrice), Alima Boumediene
Thiery (avocate), Dominique Vidal
(historien et journaliste), Olivier Le
Cour Grandmaison (universitaire), Didier
Epsztajn (animateur du blog « entre les
lignes entre les mots »), Patrick
Silberstein (mèdecin et éditeur), Alain
Cyroulnik (éducateur syndicaliste),
Philippe Cyroulnik (critique d'art),
Bernard Dreano (militant associatif),
Thierry Labica (études britanniques),
Marie Hélène Bacqué (sociologue), Rony
Brauman (médecin et enseignant), Hubert
Krivine (physicien), Ron Naiweld
(historien), Daniel Mermet
(journaliste), Irène Jami (professeure
d'histoire), Alain Bertho
(anthropologue), Armelle Andro
(démographe), Michel Maric (économiste),
Julien Talpin (sociologue), Toni Negri
(philosophe), Nacira Guénif
(sociologue), Alexis Cukier
(philosophe), Michelle Guerci
(journaliste), Fabien Marcot
(graphiste), Michaël Löwy (sociologue),
Eric Hazan (éditeur), Eyal Sivan
(cinéaste et professeur AHK), Christine
Delphy (sociologue et militante
féministe), José Luis Moraguès
(psychologie clinique et
psychopathologie, militant antiraciste
), Simone Bitton (cinéaste), Philippe
Poutou (porte parole du NPA), Christine
Poupin (porte parole du NPA), Olivier
Besancenot (porte parole du NPA), Louis
Weber (éditeur), Isabelle Garo
(philosophe), Anne Jollet (historienne),
François Burgat (politologue)...
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